Léna resta assise un bon moment, contre la porte, ne sachant pas si elle devait s’en aller et revenir demain matin ou rester pour se prouver à elle-même qu’elle était capable de le faire, capable de rester une nuit entière dans un château prétendu hanté. Des quatre, c’était sûrement elle la plus terrifiée, et elle était la seule à envisager de tricher en partant et en revenant le lendemain matin avant que ses amis ne se réveillent.
« Oui, c’est une bonne, idée, je vais faire ça. »
Léna se leva, prit son sac et entendit alors un claquement métallique. Elle se retourna brusquement et constata que le verrou qu’elle avait enclenché était cassé.
« Non, non, non, pas ça, tout mais pas ça ! »
Elle tenta d’ouvrir la porte, tirant la poignée dans tous les sens, mais le verrou avait bloqué la porte et la partie qui permettait de le tirer était brisée.
« Je suis prisonnière...je ne pourrais plus jamais sortir d’ici...AU SECOURS !!! »
Elle savait que s’époumoner ne servait à rien, elle savait l’écart énorme qu’il il y avait entre chaque chambre. Au bout d’une dizaine de minutes, elle réfléchit tout haut :
« Demain matin, mes camarades vont aller manger, voyant que je ne suis pas là, ils toqueront à la porte et là, je n’aurais qu’à leur crier d’aller chercher de l’aide...oui, mais s’ils ne veulent plus m’avoir sur le dos, ils pourraient bien me laisser ici. Et s’ils pensaient que j’étais partie ? Et s’ils ne venaient pas me chercher ? Non, tout se passera bien. »
Son regard se posa sur le verrou et sur la poignée cassée qu’elle ramassa.
« Aucune marque, il est comme neuf...alors qu’est-ce qui a pu se passer ? »
Elle était déjà terrorisée, et cette constatation ne la rassura pas, bien au contraire. Léna recula et s’éloigna de la porte. Elle trébucha à cause du mauvais état du plancher et s’étala sur le sol. Durant sa chute, sa tête avait tapé le rebord d’une table, aussi était elle inconsciente.
Á son réveil, Léna reconnu la chambre. Son premier réflexe fut de regarder sa montre : minuit moins cinq. Cette heure la fit frissonner : minuit est l’heure la plus terrifiante dans les films d’horreur, dans cinq minutes, elle allait vraiment avoir peur. Brusquement, la fenêtre s’ouvrit, laissant passer un violent courant d’air qui souffla toutes les bougies d’un coup.
« Je n’aime pas ça... »
Elle alla à tâtons jusqu’à son sac et alluma sa lampe de poche, projetant un large faisceau de lumière sur les murs. Léna s’approcha doucement de la fenêtre et se pencha, voulant vérifier s’il n’y avait personne en bas...mais quelle idée ridicule, elle était au premier étage d’un château abandonné et perdu en plein milieu d’une forêt hostile. Il y avait eu une tempête dans la soirée et désormais, il faisait nuit noire : qui pouvait vouloir ouvrir une fenêtre ?! C’était sûrement le vent, pensa-t-elle pour se rassurer, un gros coup de vent.
Léna passa sa main par la fenêtre, pas une brise ne vint lui effleurer les doigts. Il n’y avait pas de vent dehors. Elle émit un léger rire nerveux et tenta de se réconforter comme elle le pouvait.
« Tout va bien aller, les fantômes n’existent pas. »
Afin de s’en convaincre, l’adolescente projeta le faisceau de sa lampe dans la cour pour vérifier s’il n’y avait vraiment personne. Un grincement la fit sursauter, elle lâcha sa lampe qui tomba dans le jardin, sans faire de bruit.
« Non ! Oh non, oh non, oh non ! »
Paniquée, elle ne savait plus quoi faire, le noir la terrifiait, et personne ne pourrait l’aider avant le lendemain matin. La jeune fille songea alors à son briquet. Les bougies ne tiendraient pas plus d’une heure ou deux de plus et il n’y avait pas de cheminée. Léna s’empara en vitesse d’une couverture qui recouvrait le lit, en déchira un morceau, puis elle le posa sur le sol de pierre et y mit le feu. Le sol ne risquait pas de s’embraser et elle pourrait raviver le feu à tout moment. Elle devait néanmoins contrôler sa puissance, si elle faisait brûler trop de couverture d’un coup, elle risquait de déclencher un incendie : la chambre était petite et le lit de bois sec n’était pas très loin.
Des ombres menaçantes tapissaient les murs et semblaient danser au rythme des flammes. Léna en eut un nouveau frisson.
Alors qu’elle pensait avoir enfin trouvé la paix, des pas se firent entendre dans le couloir. Ses amis venaient la chercher. La jeune fille se leva et se précipita à la porte, tambourinant contre celle-ci, priant pour qu’on l’entende.
« Á l’aide, le verrou est coincé ! Venez m’aider ! »
Mais les pas s’éloignaient déjà. Léna prit un couteau qu’elle avait amené et tenta d’ouvrir le verrou avec, mais rien à faire, le verrou ne s’ouvrait pas. Même de l’extérieur, on ne pourrait pas la sauver, elle était condamnée à mourir ici, sauf si elle passait par la fenêtre et longeait en s’agrippant bien...non, c’était trop dangereux, elle en était consciente.
Terrorisée, elle rajouta quelques lambeaux de couverture à son feu, trembla une dernière fois et se recroquevilla sur elle-même, laissant glisser sur sa jour une larme de désespoir.