Karen et Léna s’arrêtèrent devant la meurtrière suivant avant de contempler la cour, à la recherche d’un quelconque élément troublant : un bruit, une lumière, quoi que ce soit. Rien ne se produisit.
« Tu crois que ça veut dire qu’il n’y a rien, demanda Léna, ou juste que j’ai raté les phénomènes étranges ?
- Je n’en sais rien, avoua Karen, je suis certaine d’avoir vu une lumière se déplacer, peut-être que...que...je ne sais pas moi...enfin, tout s’explique. Je pense qu’il y a vraiment quelque chose qui se passe ici.
- Tu penses que quelqu’un voudrait nous faire peur ?
- Sans électricité ? Sans confort, sans technologie, sans rien pour se nourrir ?
- Oui, tu as raison.
- Faire de tels effets spéciaux, même au cinéma, c’est impossible.
- Le verrou à la porte de ma chambre s’est brisé seul, quand je l’ai examiné, il était découpé droit, comme si on avait utilisé un outil. Pas une encoche, on ne l’avait pas cassé, et ça s’est passé si rapidement que personne n’aurait pu le faire sans l’aide d’une machine.
- Tu penses que ce n’est pas une légende, que cet endroit est vraiment hanté ?
- Je pense, soupira Léna.
- Tiens, nous sommes arrivés en haut. De la tour, viens voir. »
Léna rejoignit Karen au sommet du bâtiment. Il y avait une petite terrasse ronde. Les barrières installées pour empêcher quiconque de tomber étaient rouillées et l’endroit était couvert par une sorte de petit préau de bois en forme de cône. Il fallait cependant ajouter qu’après tant d’années, le bois était certainement fragile et il valait mieux ne pas toucher le toit de peur qu’il ne s’effondre.
Karen se pencha par-dessus la barrière et observa le paysage en contrebas. Léna la rejoignit mais veilla à ne pas s’appuyer contre la rambarde, de peur qu’elle ne cédât (imparfait du subjonctif, j’ai vérifié) sous son poids.
« Fais attention, déclara-t-elle, ne t’appuie pas là-dessus, on dirait qu’elle peut lâcher à tout moment.
- T’inquiète, j’ai vérifié si elle était solide avant de m’y appuyer.
- Si tu le dis... »
Á son tour, Léna observa la cour. D’ici, elle voyait une grande partie du jardin, même l’entrée par laquelle le groupe était passé. Rien ne paraissait étrange ou différend aux deux filles. Rien ne bougeait, rien ne faisait de bruit. En résumé, il n’y avait strictement rien qui eût pu attirer leur attention. Un peu rassurées, les deux filles soupirèrent. Elles s’apprêtaient à repartir, quand un grincement suivit d’un bruit strident résonna à travers la nuit. Les deux se figèrent.
« Tu as entendu, murmura Léna.
- Oui, tu crois que ça venait d’où ?
- J’aurais dit que ça venait de par là. »
Léna se tourna et fixa la cour.
« Karen, qui est arrivé en dernier ?
- Je crois que c’était toi, nous on faisait une promenade dans la cour en t’attendant. »
Á l’évocation même de ce souvenir, le cœur de Karen s’accéléra.
« Non, susurra Léna, c’est impossible...
- Pourquoi pas ?
- Parce qu’on est très mal dans ce cas. Je hais cet endroit. »
Karen se tourna vers le portail d’entrée. On pouvait le voir à travers les arbres. Á son tour, elle lâcha :
« Nous sommes pris au piège... »
Un peu plus loin, les grilles du château, seules issues possibles, étaient fermées...et couvertes de ronces. Les quatre adolescents étaient bel et bien piégés dans le château.