Auteur : Delphine
Posté le 8 décembre 2014  | Édité le 26 septembre 2017
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Brakmar

Sheila et Shola déambulaient dans les rues de Macheville. La ville portuaire, plutôt impressionnante, était repartie en plusieurs district, et celui qu’elles traversaient, le plus proche de la côté, semblait en proie a une intense agitation. Aucune des deux jeunes femmes ne savaient comment trouver Lanor ici. Sheila savait juste que la steamer avait des proches dans cette ville, mais elle n’avait jamais eu le besoin de réclamer d’autres renseignements sur ces personnes, ce qu’elle regrettait à cet instant précis. Shola gardait l’œil ouvert, Sheila ses sens en alerte. De temps en temps, elles tentaient de demander à quelques personnes croisant leur route si elles n’avaient pas vu la steamer, que Shola leur décrivait. Mais personne ne répondait vraiment. Ils allaient et venaient dans tous les sens, l’esprit trop concentré sur autre chose. Shola décrivait à son amie que les gens ne courraient pas seulement, ils avaient tous un sac ou une valise à la main ou sur le dos. Les familles se tassaient en avançant. Les gens sortaient de chez eux, à contrecœur, fermaient la porte à double tour. Ce furent lorsqu’elle aperçut des gardes à quelques endroits que leurs doutes se confirmèrent. Ils étaient en train d’évacuer cette partie de la ville.
La sacrieur pressa le pas et la zobal la suivit sans un mot. Elles louvoyèrent entre les passants, et au bout de quelques ruelles, et l’agitation se fit moindre. Et un silence pesant régnait. Si la plupart des habitations étaient désertes, elles pouvaient noter que quelques une semblaient encore habitées. Elles se demandèrent comment retrouver Lanor. Sheila savait juste par des brides de souvenirs que l’albinos lui avait dit qu’elle avait des proches dans la partie côtière de la ville. Après quelques heures de déambulations infructueuses, Shola pensait perdre espoir quand elle percuta violemment quelqu’un au détour d’une ruelle.
- Non mais t’peux pas faire gaffe ou tu marches, toi ? Râla violemment la zobal.
- Tu peux parler, t’es aveugle ou quoi ? S’indigna une voix horriblement familière.
Il y eu un grand silence.
- Lanor ?
- Sheila ? Qu’est-il arrivé à tes chev-
- Hey Shei ! C’est qui la rousse ?
- T’es qui le blond ?
- Bonjour, c’est moi !
- Salut Toi. Moi c’est Shola.
- Qu’est-ce que vous faites là, toutes les deux ?
Deux claquements de mains sonores firent s’arrêter net les phrases de chacun.
- Un peu de calme, déclara Sheila.
Shola observa la mine sombre de la steamer en silence. Elle avait l’air d’avoir changé depuis qu’elle l’avait vu la dernière fois à Murof, l’an passé. Pas changé physiquement, ou du moins très peu, mais ce fut dans son regard. Elle ne pouvait pas dire ce qui avait changé, mais quelque chose était différent. Et à côté d’elle se tenait un crâ, à en juger par ses oreilles et sa tenue. Un sourire imprimé sur son visage, un masque de plage sur la tête et ses cheveux blond platine, elle se demanda s’il faisait parti de la guilde aussi. Il avait de connaitre Sheila lui aussi.
Des bruits de pas se firent entendre, accompagnés de cliquètements métalliques. Des gardes sans doutes.
- On ne doit pas rester ici. Une amaknéene et une bontarienne dans les rues d’une ville brakmarienne ça ne fait pas bon ménage.
La steamer hocha la tête et les invita à la suivre. Elle les fit entrer dans une maison toute en hauteur, coincée entre deux autres maisons. Ils s’installèrent dans la petite cuisine, et firent rapidement les présentations entre Sho et Nata.
- Pourquoi êtes-vous venues ? Reprit alors Lanor.
Son attitude se voulait calme, pourtant, elle était la seule debout, les mains appuyées sur la table. La nervosité dans sa voix n’échappa cependant pas à la sacrieur.
- Que s’est-il passé ? demanda-t-elle simplement.
Le masque de flegme qu’arborait la jeune fille se fissura, et au bout de quelques minutes de silence, elle finit par s’assoir, la tête dans les mains.

Lanor leur raconta tout. La raison de son départ de la guilde, à cause d’une fausse lettre, son incapacité à se rendre directement dans la demeure familiale, son passage ici. Elle marqua une pause, puis raconta comment elle avait décidé de finalement se rendre chez elle, seule. Et comment elle avait assisté à l’explosion d’une partie du manoir, alors qu’elle s’y rendait. La suite fut plus confuse. Nata prit le relais et expliqua brièvement qu’ils avaient réussi à rapatrier la mère, la sœur, blessées, et le frère, actuellement dans le coma. Le père n’avait pas survécu. A la suite de ça, l’évacuation des quartiers habités la côté avait commencée, et ils avaient évacués vers Sufokia, la patrie de naissance de la mère de Lanor. Il ne restait presque personne dans cette maison, de fait. Lanor reprit la parole en expliquant qu’elle n’était pas partie avec eux car elle ne croyait pas en l’explication des journaux. Shei repensa à ce qu’elle avait entendu, comme quoi ce serait un coup d’Amakna. Mais la steamer n’était pas tombée dans le panneau, et avait même relevé quelques contradictions avec cette théorie. Ces derniers jours, elle et Nata avaient mené une petite enquête, qui avait fini par porter quelques fruits. Les affaires de son paternel Elles avaient plusieurs théories, dont la plus plausible était une attaque d’une entreprise concurrente. Nata avait dit que c’était lâche. Elle avait répondu que c’était Brâkmar. Ils profitaient de l’évacuation pour enquêter sans attirer trop l’attention. Et ils étaient sur le point de se rendre dans la capitale pour vérifier leurs sources quand ils s’étaient croisés.
Un silence suivit les explications.
- Je croyais que tu te fichais des affaires de ton père, déclara Shei.
La steamer se redressa vivement.
- J’m’en fiche de lui, tant mieux qu’il soit mort d’ailleurs. Je veux juste savoir QUI a fait ça !
- Et une fois que tu auras trouvé les responsables, que feras-tu ?
- J’en sais rien ! s’écria-t-elle en frappant du poing sur la table, faisant sursauter le crâ assis à côté d’elle, manquant de le faire tomber de sa chaise.
Elle replaça à nouveau sa tête dans ses mains. La zobal remarqua à quel point elle était épuisée. Il lui semblait même voir ses mains trembler. Et au vu des cernes sous ses yeux, elle se demanda depuis combien de temps elle n’avait pas dormi correctement. Nata passa maladroitement un bras autour de ses épaules. Shola se demanda comment il pouvait la supporter. Elle se promit de lui demander plus tard, poser la question ici serait d’assez mauvais goût, surtout en ce moment.
- Je veux juste que ceux qui ont fait ça paient pour leurs crimes. Ils ont blessés ma mère et ma soeur. Mon frère est dans le coma. Et ils osent faire passer ça sous le couvert d’une guerre.
- Si tu veux qu’on t’aide, tu peux nous le dire, fit remarquer Sho. Juste, on doit être partie après-demain. Et on vous embarque aussi.
Lanor les regarda, puis baissa les yeux. Elle les ferma un instant, puis se redressa. Sheila décroisa les bras pour virer de la table les pieds de Sho, qui râla un peu, tandis que Nata, revenu à sa position d’origine, vint entrelacer discrètement ses doigts aux siens sous la table, lui redonnant un peu de courage. Deux jours, c’était faisable, normalement.
- Quand nous vous avons croisé, nous allions vérifier nos sources à la capitale, déclara-t-elle.
- Je crois avoir trouvé ce que c’est. Il faut qu’on aille vérifier quand même, ajouta le crâ.
A défaut de son regard, Sheila pointa le doigt vers les deux jeunes gens. Surtout vers Lanor, en fait.
- Je veux bien t’aider dans ton entreprise. Cela me semble juste de réclamer un jugement pour ces lâches. C’est ton droit.
La steamer esquissa un sourire, soulagée. Elle savait qu’elle n’aurait rien pu faire si la sacrieur avait décidé du contraire.
- Cependant.
Son sourire se figea.
- Lanor, je ne sais pas trop ce que tu cherches, dans tout ça. Alors voilà ce qu’on va faire. Si d’ici après demain soir, on a pas réussi a faire ce qu’on veut faire, alors on part. Notre bateau n’attendra pas. Et je te promets que je te ramène de force, tu sais très bien que ça ne me posera aucun problème.
Hochement de tête, puis silence. Que Sho rompit dans un bruyant bâillement.
- Allons dormir, on verra le reste demain matin, dit-elle en se levant.
Lanor hocha la tête puis Nata alla leur assigner des chambres dans celles dont les propriétaires étaient absents. Du coup toutes, en fait. Les parents étaient partis à Sufokia, tandis que les deux enfants étaient enrôlés dans la réserve Brakmarienne. Tandis que Sho se ruait dans les escaliers, surement dans le but de se jeter sur un lit, et que Nata lui montrait les pièces, Sheila retint un instant l’albinos par le bras.
- Lanor.
Calme et ferme, le ton de sa voix ne présageait rien de bon.
- Si jamais cela tourne mal, que ça « dérape », sache que tout ça tournera court. La vengeance n’amène rien de bon, tu le sais.
L’avertissement sous-jacent n’appelait aucune réplique.
La steamer déglutit, et hocha la tête avant de se rappeler que la jeune femme de pouvait pas la voir. Elle murmura un « oui » étranglé, avant de se réfugier à l’étage. Sheila soupira, puis la suivit dans les escaliers, dans l’espoir qu’une bonne séance de méditation l’aide à faire le point.

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