Posté le 30 janvier 2013
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Melhuin marchait. Alors que la nuit était profonde et noire, une Lune ronde et claire éclairait les montagnes, et les nuages qui couvraient le ciel glissaient rapidement.
Une légère pluie rafraichissait l'air, chaque goutte frappait le sol en un son apaisant et harmonieux, comme une berceuse. Il marchait.
Le loup était nourri par le visage illuminé de cette Lune, et celle-ci semblait veiller Thaodia, comme une mère. Son fils était préoccupé, mais ne parvenait plus à réfléchir. Il fixait le sol devant lui, son pas était faible et l'on entendait son souffle par moments. Melhuin tremblait. Sa fourrure couleur bois était devenue presque rousse, quelques taches sombres parsemaient son pelage, un mélange de boue et de sang qui collait à son poil. À certains endroits, une plaie était visible, et autour de celle-ci se pressaient d'autres de ces taches. Lorsque les quelques branches où les nuages le dissimulaient de l'astre lunaire, son poil devenait sombre et sa silhouette terrifiante. Son souffle s'accélérait et donnait l'impression d'entendre un monstre exité par une odeur de sang, comme celui qu'il était. Bien qu'il ait toujours très bien vécu son animalité, certaines facettes de sa personnalité échappaient à toute logique, y compris à lui-même, et cela le troublait. Sa double apparence avait, depuis peu, laissé place à une troisième entité, un mal profond. Bien qu'il eût surement été provoqué par le traumatisme, Melhuin se doutait que cette chose était en lui depuis toujours, il était alors en proie au doute, à l'incompréhension des gens de son sang et à lui-même. Il avait un jour fait un souhait, et celui-ci venait de repointer le bout de son nez, alors que tout le monde l'avait oublié. Le loup avait voulu tout recommencer depuis le début. À la disparition de Thiana, il avait formulé cette demande, cette prière à la Lune :

"Mère, tes fils m'ont ôtés mes frères,
mes soeurs, ma famille, et mon âme !
Je t'implore toi, astre stélaire
Pour me libérer de mon dam !
Râge, ramenez moi à la vie,
J'oublierais le sang et les cris..."


Melhuin n'avait plus pleuré que sous cette même Lune, chaque jour il oubliait, et chaque nuit il redevenait lui-même. Alors il aimait les astres comme il aimait les siens et maudissait le soleil comme son Père. Depuis ce jour, il avait eu accès à une seconde vérité sur lui-même, il vivait autrement, il se sentait libéré d'une partie de son mal. Mais lorsque l'on obtient ce qu'on désire, on est souvent déçu.
Son pas était toujours plus faible, et son souffle plus inquiétant. Il ne parvenait plus à marcher droit, et à suivre le chemin qu'il sétait tracé mentalement. La nuit lui semblait encore plus sombre, il n'y avait plus d'étoiles, et un sentiment d'oppression le saisit. Son corps ne répondait plus, il était comme libéré de la volonté de son esprit, il ne pouvait pas s'arrêter.
Alors, la lumière des astres diminua, et la Lune s'assombrit pour enfin disparaître dans le voile noir du ciel. Les montagnes disparurent, et le fossé qui bordait le chemin disparut, en même temps que tout le reste. Tout était noir, tout était silencieux, même la pluie s'était tue. Plus rien n'existait, et pourtant, il sentait encore le sol sous ses pattes un court instant avant que celles-ci ne deviennent insensibles. Il ne sentait plus rien. Il avait chut sur son flanc gauche, et la flèche brisée qui y était fichée, s'enfonça encore plus profond, laissant s'écouler la vie du Loup. Les ténèbres grouillaient autour de ce corps, et plus rien n'existait, il ne percevait même plus sa propre conscience. Le Néant.

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