Posté le 31 janvier 2014
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Écoute sa voix, laisse toi porter et danse.


La première fois qu'elle avait tenté l'expérience datait maintenant de quelques mois. Elle ne regrettait pas, mais elle avait tendance à ressentir une importante gène lorsque le souvenir de cette soirée venait titiller ses sens.
Ce soir-là, le silence inhabituel de l'appartement qu'elle louait depuis l'été dernier l'avait rassuré. Elle s'était tout naturellement dirigée vers la salle de bain, franchissant le séjour pour y arriver. Elle aimait la petitesse de l'endroit, elle y avait tout ce qu'il lui fallait, une chambre, une cuisine, une salle de bain et un débarras qui lui servait maintenant d'atelier. Alors que ses pieds nus frôlaient le carrelage frais du sol, un long frisson couru le long de son dos. Elle pouvait enfin se détendre et récupérer un semblant de calme. Sa journée avait été éprouvante. Elle n'aimait pas le jeudi, et ne l'aimerait probablement jamais.
Elle s'immobilisa un instant devant le large miroir qui mangeait la moitié du mur à sa droite. Son visage reflétait toute la fatigue accumulée ces dernières semaines, son teint était un peu plus pâle et ses cernes, qu'elle s'efforçait de dissimuler derrière un baume, étaient bien visibles. Elle soupira et tourna le dos à la glace, retirant rapidement ses vêtements pour se glisser avec délice sous l'eau chaude de la douche. Elle n'eut pourtant pas le temps d'y poser ne serait-ce que le plus petit doigt de pieds que la sonnerie de son téléphone retentit. Elle ronchonna pour la forme et enfila son peignoir bordeaux, elle se doutait déjà de qui serait à l'autre bout du fil. Bien sur, ce n'était pas pour lui déplaire, mais son petit-ami, en déplacement pour le reste du mois, avait tendance à devenir agaçant.

« Allô ?

- Bonsoir Alice, répondit-il d'un ton suave.

- Morgan. Qu'est-ce que tu fous ? Tu rentres dans moins d'une semaine.

- Oh allez, ne dis pas que ça ne te manque pas à toi aussi, n'est-ce pas ? »

Elle fronça le nez d'un air de dégoût, Morgan avait bu, ça s'entendait, ce ton suave presque aguicheur elle ne lui connaissait que quand il avait bu. Oh non, il n'était pas du genre à crier à toutes heures, mais il avait cette voix forte et froide qui l'avait fait craquée le jour où elle l'avait rencontré, et qui ne le quittait que lorsqu'il buvait.

« J'en ai envie Alice, et je sais que toi aussi, ça fait longtemps...

- Morgan, c'est pas le moment, je viens de rentrer.

- Justement, c'est le meilleur moment, allez, allonge-toi sur le canapé... Tu verras on va s'amuser.

- Morgan ! On est au téléphone merde. Tu peux pas attendre de rentrer pour ça ?

- Alice... »

Ses yeux s'écarquillèrent l'espace d'un instant, et elle ne put empêcher une petite vague de chaleur de s'emparer de son corps à l'entente de son prénom gémit avec une telle langueur. Pourquoi diable ne raccrochait-elle pas ? Pourquoi s'obstinait-elle à décrocher dès que son nom apparaissait ? Pourquoi trouvait-elle la situation de plus en plus érotique ? Pourquoi s'était-elle donc assise sur son lit ?

« Quand je ferme les yeux Alice... Ce sont tes mains qui courent sur mon ventre... Tes mains si douces...

- Morgan... C'est pas sérieux, arrêtes. »

Sa voix était loin d'être convaincante, elle sentait ses barrières tomber une à une. Elle n'avait jamais pu lui résister, il avait ce charme et cette assurance qui vous faisait ployer comme un roseau sous le vent. Et Alice, bien qu'elle lui tienne tête dans la plupart des domaines, n'arrivait jamais à le faire dans ce domaine précis, elle se laissait toujours emporter, ses sensations l'entraînait bien loin, tout autant que l'appréhension et l'excitation qui lui retournaient l'estomac en ce moment même.
Elle s'était laissée retomber sur son lit, bien calée entre ses coussins, immobile, attentive au souffle et aux mots de Morgan, réceptive et pourtant figée par l'angoisse de le faire.

« T'en crèves d'envie chaton... Je l'entends... »

Elle le détestait. Elle le détestait parce qu'il avait raison et qu'elle en était consciente. Après tout, il avait peut-être raison... Elle était toute seule dans son appartement, personne pour la surprendre ni pour l'entendre. Et puis, ce serait la seule et unique fois.

« Ok, ok. C'est bon Morgan. Mais juste cinq minutes.

- Oh oui Alice... Alors dis-moi, dis-moi ce que tu rêves que je te fasse. »

Elle se laissait submerger par ses émotions, par la sensation de redécouvrir ces caresses qu'elle avait depuis longtemps arrêté de se prodiguer pour la simple et bonne raison qu'un autre le faisait à sa place. Depuis qu'elle était avec Morgan, et peut-être même un peu avant, elle n'avait plus laissé sa main naviguer sur son corps de cette façon, frôler sa poitrine et ses tétons sensibles, effleurer la peau douce de ses cuisses. Son envie et son excitation grimpaient en flèche, et ce n'était pas pour déplaire à son interlocuteur qui, lui aussi, en profitait et prenait un malin plaisir à la faire flancher.
Le téléphone gisait à côté de son visage, haut-parleur enclenché, presque collé à son oreille. Les yeux clos, elle se laissait guider par la voix grave de Morgan, ses mains avaient suivi le tracé évoqué par sa voix, si naturellement qu'elle s'en était un peu effrayée. Mais plus la tension en elle grimpait, plus sa perception de la réalité s’effritait, elle se confondait, elle se perdait.

« Ali... Encore... »

Ce surnom qu'il n'utilisait que dans les moments les plus tendres de leur relation venait de la faire décoller. Elle se laissa bercer par la force de son orgasme, écoutant avec délectation Morgan en faire de même dans un dernier gémissement en son nom. Ses membres engourdis la laissait pantelante, que venait-il de se passer au juste ?

« Je t'aime Ali. »

Elle allait répondre, mais Morgan raccrocha, sûrement trop habitué au fait qu'elle ne le fasse pas, ou qu'elle change de sujet, trop pudique et gênée pour oser ne serait-ce que de lui avouer qu'elle l'aimait. Elle le lui montrait, comme cette fois-là, cette soirée-là.

FIN.

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