La relation que partagent Alexandre Hautmont et Adonis Leroy prend ses racines bien avant leur naissance. Elle commence avec leurs mères respectives, Valentine et Louise, amies de toujours, amantes de quelques années. Les deux jeunes femmes étaient des sang-pures destinées à se marier avec des hommes de leur classe sociale, riches et plus âgés qu'elles. Elles avaient accepté leur sort depuis bien longtemps, aidées par la promesse qu'envers et surtout contre tous, elles resteraient ensemble. Elles n'étaient qu'adolescentes quand elles se marièrent, Louise avec un Leroy, Valentine avec un Hautmont. Quand elles jurèrent fidélité à leur mari, ça ne les percuta même pas qu'elles étaient déjà en train de les tromper : elles s'aimaient passionnément mais avaient toujours dû cacher leur histoire et leurs sentiments, c'était devenu aussi facile que de respirer. Elles ne se rendirent pas compte de ce à quoi elles avaient signé : une vie cachée et malheureuse puisqu'elles ne pourraient jamais être ensemble, pas comme elles l'auraient voulu, tout du moins. Monsieur Leroy et Monsieur Hautmont étaient néanmoins ravis de ce qu'ils voyaient de l'extérieur : une très grande amitié entre leurs épouses. Les deux femmes tombèrent enceinte en même temps, toutes deux de garçons, qui naquirent avec quelques jours de différence, à l’extrême fin de l’automne 1959. Leur décision fut sans appel : leurs fils devaient grandir ensemble, ils seraient comme frères l’un pour l’autre. Leur maris ne s’opposèrent pas à leur choix, et de toutes façons elles ne leur avaient pas laissés une seconde pour contredire cette décision. Adonis et Alexandre passèrent alors leurs premières années ensemble, inséparables comme leurs mères, tels deux jumeaux. Ils se ressemblaient beaucoup, d’ailleurs, ils étaient blonds, avaient la même petite bouille mignonne, l’un avec les yeux miels, et l’autre bleus azur. Peut après qu'ils aient fêté leur quatrième anniversaire, un rumeur commença à se répandre dans la haute bourgeoisie sorcière. Mmes Leroy et Haumont tromperaient-elles leur mari ensemble ? Il fallu quelques semaines pour qu'Henri Leroy découvre tout ; le mari de Valentine, lui, était au courant quasiment depuis le début. Si les deux époux ne s'étaient jamais aimés d'Amour, ils avaient toujours tout partagé, comme des meilleurs amis. M. Leroy, en plus de son dégoût face à cette situation, refusait que sa famille risque un peu plus le scandale, que son nom soit entaché. Il força les deux femmes à se séparer, et interdit à son épouse de revoir « La Hautmont », comme il l'appelait. Les deux jeunes garçons, presque frères, furent eux aussi séparés. Ce qui fut sûrement le plus difficile pour ces pères, fut d’entendre leur fils leur demander quand est-ce que leur frère allait revenir à la maison. Henri a-t-il pour autant regretté la décision d’avoir écarté sa femme de la Hautmont ? Jamais : le scandale, et un d’une telle ampleur, est trop mauvais pour l’image. Quand Adonis et Alexandre arrivèrent à Beauxbâtons, l’œil vif et neuf à toute la magnificence du palais qui s’offrait à leur vue, ils ne se reconnurent pas tout de suite. Néanmoins, le destin semblait vouloir les réunir. Les lits qui leurs étaient assignés dans le dortoir des garçons étaient voisins, et ils s’étaient retrouvés par hasard à s’asseoir aussi côte à côte lors du premier cours de leur scolarité, celui de Métamorphose. Vite, ils s’échangèrent leurs prénoms. S’il y avait un nombre inconsidérable d’Alexandre en France, le prénom Adonis n’avait rien de commun, et c’est avec le regard pétillant qu'Alex avait fait : « Leroy ? Adonis Leroy ? ». A l'image du phénix, leur amitié renaissait de ses cendres, plus forte qu'elle ne l'avait jamais été, pour le meilleur et pour le pire. Ils firent toutes les conneries ensemble. De natures assez différentes, ils avaient l’air de s’être trouvés et s’associaient parfaitement. Bien vite, quand les gens parlaient d’Adonis, ils sous-entendaient Alexandre, et vice-versa. Les deux garçons furent séparés à nouveau, pendant leur cinquième année, à la suite d'une erreur qu'Adonis regretta pendant très longtemps. Depuis un peu plus de trois mois, Alexandre sortait avec une fille nommée Hélène, qui aux yeux de tous, sauf des siens, était une peste. Adonis tentait de ne pas juger, mais il sentait qu’Hélène était mauvaise pour lui. Mais Alexandre était fou d’elle, profondément amoureux, autant que peut l’être un adolescent de quinze ans peut l'être en tous cas. Un soir de vacances, un élève de Beauxbâtons fêta son anniversaire, et avait invité toute l'Académie dans son énorme masure du sud de la France. Tout le monde s’était débrouillé pour venir, sauf Alexandre. Mais Hélène, elle, était là, tout comme Adonis, dont la réputation de séducteur invétéré était déjà formée, et ce qui devait arriver arriva : devant tout Beauxbâtons, elle embrassa Adonis, qui se laissa largement faire, et prolongea même ce baiser, puisque les choses doivent être dites. Alexandre fut probablement le dernier au courant de cette histoire, à la rentrée suivante. Dès qu’il le vit, Adonis lui avoua tout, plus honteux et culpabilisé que jamais. Alexandre, à la suite de cette révélation, ne dit pas un mot ; il se contenta de s’éloigner. Pendant plus de quatre mois, malgré les excuses constantes d’Adonis, il resta loin, mutique comme il ne l'avait jamais été. Le pire pour Adonis fut probablement de voir Alexandre pardonner son action à Hélène. S'il trouvait son éloignement légitime, il trouva injuste qu'Alexandre pardonne à sa petite amie avant de pardonner son meilleur ami. Mais les deux n’étaient probablement pas destinés à se séparer, ou peut-être pas tout de suite. Brutalement, Alexandre se remit à s’asseoir à côté d’Adonis en cours, dans la Salle des Repas, comme si rien ne s’était passé. Ils se parlaient à nouveau, riaient ensemble, mais paraissaient constamment mal à l'aise. Adonis ne pouvait se résoudre à laisser leur relation ainsi : quelque chose s’était cassé entre eux, et malgré tous les efforts d’Alexandre, ils en boitaient toujours. Adonis poussa alors la discussion, un soir, et ça dura toute la nuit. Je vous épargne ce qui s’est dit, sinon vous pouvez ajouter 1000 mots à ce "résumé" de lien. En tous cas, depuis cette nuit, Adonis avait retrouvé son meilleur ami, et les deux s'accorderont pour dire que cet événement a certainement renforcé leur relation : ils avaient pu en voir les limites, et avaient appris qu'il ne fallait pas la prendre pour acquise. Comme toute relation, celle qui unissait ces deux français était à travailler et entretenir tous les jours. Adonis apprit qu’il partirait pour Poudlard en juin de sa sixième année, et que ça se ferait sans Alexandre. Oh bien sûr, l’un comme l’autre s’y attendaient, mais ça ne rendait pas les choses plus faciles. Certains amis communs partiraient en Angleterre et d'autres restaient en France, mais ce n'étaient pas pareil : ils auraient préféré ne pas être séparés. Ce n’était que pour un an, me direz-vous, mais ils ne pouvaient s'empêcher de trouver ce pari risqué. Alexandre et Adonis restèrent pourtant en contact, au travers d'une correspondance plus que fournie ; il faut dire qu'ils avaient des choses à dire. Pendant leur septième année respective, Adonis perdit sa mère, et Alexandre perdit Hélène. Pas de la même manière, certes, puisque Louise Leroy mourut, alors qu'Hélène se contenta de s'éloigner. Ce fut néanmoins particulièrement douloureux pour nos deux jeunes hommes, qui s'en remettaient à leur meilleur ami pour tenter d'aller mieux. Louise Leroy était morte lentement, ça avait été des mois de souffrance pour elle et pour son fils, qui était persuadé qu'elle était morte de sa main. Un poison lui avait en effet été administré, produit par la main d'un adolescent qu'Adonis avait énervé. Mais elle n'était pas supposée en mourir, ce n'était pas censé faire cet effet-là. Elle aurait été forte et heureuse, elle y aurait survécu. Mais Louise Leroy était faible et malheureuse : elle n'avait eu aucune chance. Le 4 mai 1977, il fallut enterrer Louise Leroy, qui avait passé plus de six mois à se mourir dans d'atroces souffrances. Quand Adonis, sa meilleure amie Cassandre et sa petite-amie Georgia arrivèrent enfin, deux jours après le décès de Louise, dans la maison familiale de l'arrière-pays niçois où elle avait voulu être enterrée, Alexandre manqua de ne pas le reconnaître. Il lui avait fallu faire des mains et des pieds pour être présent à cet enterrement ; pour dire les choses simplement, il était loin d'être le bienvenu chez les Leroy, et ce malgré son sang pur et sa qualité de meilleur ami d'Adonis. Pourtant, il n'avait pas le choix : il fallait qu'il y soit, non seulement pour Adonis, mais aussi pour sa mère. Il était absolument impossible que Valentine Hautmont, qui avait vécu cette idylle interdite avec Louise, soit présente à cet enterrement, il fallait alors absolument que son fils, lui, puisse y aller. Elle se décida alors à enfin raconter à Alexandre ce qu'elle n'avait jamais eu le droit de dire à personne : comment, à seize ans, promis à celui qui deviendrait son mari, elle était tombée amoureuse de Louise Gauthier. Coûte que coûte, Alexandre irait à cet enterrement, mais pas avant d'avoir juré qu'il ne raconterait pas cette histoire à Adonis ; ce n'était pas le moment, jugeait-elle. Après avoir passé près d'une nuit à parlementer avec Henri Leroy, Alexandre obtint l'autorisation de rester. Le patriarche finit par se féliciter de son choix, se disant qu'il n'aurait pas à sécher les larmes de son fils auquel il n'avait jamais su parler si ses meilleurs amis – et une sang-pure anglaise, il avait fait ses recherches – étaient là pour lui. De toute façon, les deux femmes ne risquaient pas de se retrouver par l'intermédiaire de leurs fils, puisque l'une des deux était morte. Alexandre ne reconnut donc pas son meilleur ami quand il apparut du Porteloin en forme de miroir posé dans le petit salon des Leroy. Il avait changé : perdu du poids, gagné quelques centimètres de cheveux, ses cernes violacées marquaient son visage jusque ses joues et son odeur empestait la cigarette. Et Adonis, quant à lui, ne sembla pas vraiment s'intéresser à cette présence pourtant étonnante dans sa maison. Il grimpa dans sa chambre, pour se replonger, pour la millième fois, dans la lecture de Bel-Ami ; ou était-ce Autant en Emporte le Vent ? Il ne savait même plus ; il dévorait ces pages qu'il adorait sans même savoir si leur héros s'appelait Du Roy ou Scarlett, pour se sortir, au moins pour quelques minutes, de l'horreur de ce qui lui arrivait. Alexandre pris relativement bien les choses en main. Il poussa Adonis à la douche, resta avec lui pour s'assurer qu'il ne se contenterait pas de se noyer sous l'eau, il lui ordonna de se raser, lui trouva un costume pour la cérémonie, et glissa quelques gouttes d'un puissaant somnifère dans son verre de vin pour qu'il puisse dormir après celle-ci. A vrai dire, Adonis se serait peut-être endormi sans ; il avait tellement pleuré que se retrouver dans les bras de Georgia aurait pu lui suffire pour s'endormir. Le lendemain, Adonis ordonna qu'on lui trouve un portoloin qui le ramènerait à Londres sans plus tarder. Il serra son meilleur ami dans ses bras, le remerciant de tout ce qu'il avait fait pour lui, et tourna le dos à son père, sur lequel s'était reportée toute sa colère. Touchant du bout des doigts le portoloin, il se jura qu'à partir de la seconde où il poserait son pied à Poudlard, il ne verserait plus une larme. Il obéit à cette promesse avec une rigueur qui étonna tout tout le château, et qui résonna jusqu'à Beauxbâtons ; dans ses lettres à Alexandre, Adonis ne mentionnait jamais sa mère, il écrivait que tout allait bien, qu'il se concentrait sur ses ASPIC, qu'il avait des projets … Alexandre n'y croyait pas vraiment, mais il ne pouvait pas faire grand-chose, il était trop loin. Comme prévu, cette façade ne tint pas bien longtemps : avant la fin de l'année scolaire, Georgia avait quitté Adonis, et celui-ci, après ses ASPIC qu'il passa avec brio, tourna le dos à sa famille avant de s'exiler tout l'été dans un studio parisien dont il n'avait donné l'adresse qu'à ses amis les plus proches. Alexandre ne trouva néanmoins pas la force d'aller immédiatement le secouer, puisqu'il devait lui-même gérer la rupture définitive que lui imposa Hélène. C'est Cassandre, meilleure amie d'Adonis, qui finit par réunir nos deux français, en allant chercher Alexandre pour qu'il participe à une mission de sauvetage pour Adonis, qui avait une fâcheuse tendance à se morfondre assez facilement et pendant trop longtemps sur son sort. Ils l'aidèrent à mettre de l'ordre dans son studio, à retrouver sa baguette qui s'était perdue sous les dizaines de cadavres de bières étalées un peu partout, et surtout, ils le poussèrent à aller chercher un bouquet de fleurs qu'il irait offrir à Georgia. Contrairement à ce qu'avaient vécu Hélène et Alexandre, qui se terminait irrémédiablement, ce qui unissait Adonis et Georgia ne faisait que commencer. Alexandre, après ce séjour express à Londres, prit une décision qu'il espérait ne pas regretter : il voulut laisser derrière lui la France, qui lui rappelait trop Hélène, et demanda à ses parents de lui payer un appartement à Londres où il pourrait vivre, se rapprochant du même coup d'Adonis, qui n'avait aucune intention de rentrer chez les Leroy à Paris. Adonis et Alexandre vivent donc ensemble dans cet appartement loué par les Hautmont, et largement squatté par Georgia, qui n'avait effectivement pas fait une croix sur sa relation avec Adonis. Plus proches que jamais, Adonis et Alexandre continuent d'être pris pour des frères, chose qu'aucun des deux ne dénie.