Phy était une personne qu’on avait tendance à qualifier d’insouciante –qualité qui pourrait se révéler fort désavantageux dans une mission- elle était trop vive, trop énergétique, trop impulsive... mais je n’étais pas d’accord. Phy était une personne qui illuminait les journées des habitants d’Eel, qui illuminait mes journées à moi. Il faut dire que sa joie de vivre et son humour la rendent tellement adorable. Son visage rond, ces pommettes rosâtres … irrésistibles. J’admirais le cerisier centenaire qui se tenait gracieusement devant moi, mon esprit embrumé par les traits du visage de ma belle, par sa voix cristalline, son rire pénétrant, son regard profond. Dieu sait que je l’aime, que je l’admire, mais que je n’ai pas eu suffisamment de courage pour lui révéler les profondeurs de mon cœur. A la place, je lui faisais des farces, j’aimais la taquiner dans l’espoir de recevoir l’un de ces sourires qui avaient le pouvoir de réchauffer mon âme. J’aimais passer du temps avec elle, au bord de la plage, rien que tous les deux. Son regard qui se dirigeait dans le mien. J’avais l’impression qu’elle pouvait lire en moi, qu’elle pouvait voir en moi comme nul autre auparavant. Si je le pouvais, je l’aurais liée à mon cœur pour qu’elle puisse prendre conscience de mes sentiments, bien trop forts, bien trop profonds pour qu’ils puissent être contenus dans un lieu aussi petit. Tantôt perdue dans ses pensées, tantôt enjouée et enfantine, Phy me laissait être moi-même. En sa présence, je n’ai pas besoin de jouer un rôle comme avec tous les autres membres de la garde. J’aimais la personne que j’étais. Lorsqu’elle me regarde, je ne voie aucun jugement, seulement de la gentillesse, de la douceur. Je la sentais arriver, sans même que j’eus besoin de me retourner. Je connaissais la tonalité de ces pas, de son souffle. Je sentais son énergie. -Chrome ! Je lui fis face, immédiatement noyé dans ses iris marron. Elle était là, face à moi, le regard pétillant, contenant une lueur de malice et de complicité. -Toujours partant pour la mission de demain j’espère, me taquina-t-elle avec une tape amicale à l’épaule en supplément. -Bien sûr, comme tu peux le voir, je suis toujours prêt, ironisais-je, car en réalité, je ne m’étais pas du tout préparé. Nuit et jour je n’ai pensé qu’à la manière dont je lui ferais part de mon amour, de mes sentiments pour elle. Je me demande comment j’ai fait pour devenir aussi amoureux.