Auteur : Philippe BICHET
Posté le 8 juillet 2019
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Article EIGER

Un lundi de Mai 2003:

Laurent LINOTTE, très bon pilote de voltige avion et très fin planeuriste, m’appelle pour me demander si je suis prêt pour les essais de l’Eiger ; ma dernière grande plume. Il m’informe qu’il va essayer son nouveau moteur, un OS 26 cc, monté sur son avion de prédilection. Si le moteur le satisfait, il est d’accord pour remorquer mon planeur. Rendez-vous est pris au terrain des Aigles Comtois pour le début d’après-midi. Les conditions météo sont excellentes pour un premier vol : pas de vent, et malgré un plafond bas, le vario est dans du coton, au pif dans du zéro +. Je monte mon nouveau-né, et peaufine les réglages des volets : débattement et symétrie, avec le mixage des volets vers ailerons. Arrivé en piste, un autre solide gaillard, Olivier, pilote de jet modèle réduit et amateur de vol à voile, se moque de moi en me raillant sur le claquement de mes rotules qui se prennent pour des castagnettes andalouses. Je lui fait part de mes doutes sur la garde au sol de mon fuselage, le train amorti fatiguant sérieusement sous le poids du modèle. Je n’ai pas fini de soulager l’Eiger pour le poser sur la piste, qu’une pièce du train rentrant lâche, dans un claquement sinistre... Laurent, avec sa gentillesse habituelle, me propose d’essayer de décoller depuis l’herbe, en émettant des réserves ; et en me demandant de larguer de suite si mon planeur n’a pas décollé avant un repère précis. Faut vous dire que le remorqueur n’est autre que son Piper Cub de 2.40 m et que les 7 Kg de l’Eiger vont devoir traîner dans l’herbe, pile poil sur le passage du train. Le pilpatant monte dans les tours, et j’essaye de ne pas trop me stresser, tout en suivant les conseils de Laurent qui me demande de mettre le premier cran de volets pour aider au décollage. Olivier se poste au repère, en se tenant prêt à me donner le top pour le largage de sécurité.

Et hop, c’est parti... Les premiers mètres se font à l’arraché, mais dès que le Piper est sur la piste en dur, nous prenons assez de vitesse pour que je puisse décoller avant la limite herbe - piste. Pas de soucis majeur sur les premières sensations, juste quelques crans de trim à la profondeur. Je largue tôt, vers 100 m. Je m’aperçois de suite que j’ai affaire à un type de vol que je ne connaissais pas jusqu’alors. Une impression de calme et de sérénité se dégage de l’Eiger, avec une vitesse de vol tout à fait raisonnable, confirmée par Olivier qui me dit alors : « Cà vole tout seul... » C’est vrai garçon ; çà vole tout seul, et je me croirais aux commandes d’un camion ; tant la sensation de stabilité est omniprésente. J’appréhende l’attéro, car l’herbe est très haute. Je ne dispose que de peu de place pour poser la bête dans la zone tondue, avant le seuil de piste. Evidemment je foire l’attéro, et l’Eiger part dans une valse autrichienne en touchant de l’aile droite les herbes hautes. Un craquement plus qu’inquiétant vient mettre fin à ce vol...Consterné, je me dis que je vais ramasser des morceaux...Penses-tu, queudalle, je ne constate qu’un très léger tassement de la nervure droite d’emplanture, le bruit pas très rassurant n’est en fait dû qu’à l’arrachage des brins d’herbe, qui se sont fichés à la jointure de mes winglets. Les vols suivants me permettront de reculer le centrage, et confirmeront la docilité de l’Eiger. La mollesse des ailerons sera très désagréable, mais je m’y attendais, vu les débattements limités par cette fameuse commande intégrée de chez Conrad. Après quelques vols, et sur les avis communs de pilotes auxquels je prêterai l’Eiger ; j’opterai pour le programme Glider 4 sur la FC 18, pour pouvoir activement un mixage ailerons vers volets. Mais ne disposant que de 8 voies à l’émetteur, je devrai donc actionner simultanément la rentrée du train avec le largage. Une phase de réglage des différents mixages volets vers ailerons et ailerons vers volets, me conduira à adopter une configuration qui s’apparente à celle d’une hélice lors d’un ordre aux ailerons ; dont on modifie le pas, lors des manoeuvres de volets. Ce qui est surprenant, c’est qu’au fil des réglages de ces mixages, je me suis orienté vers un différentiel inverse aux ailerons ; qui va à l’encontre de ce que l’on à l’habitude de pratiquer. Cette particularité ne s’accompagne pas du tout d’une augmentation du lacet inverse, mais au contraire d’un lacet induit ; qui est très agréable en spirales ; l’Eiger ayant tendance à déraper légèrement et non pas à glisser. Le planeur s’auto-centre dans les pompes et régule apparemment de lui-même son rayon de giration, ce qui est très confortable ; surtout quand on gratte de loin.

Genèse du projet :

Roger ROY, peintre légendaire qui arpentait le site de vol de pente d’Echevannes, m’avait marqué par son aptitude à observer, disséquer et commenter le vol des grands oiseaux voiliers. Ceux qui l’on connu se souviendront longtemps des discussions passionnantes qu’il initiait, sur la forme des ailes, des saumons elliptiques ; et qui venaient égayer les vols interrompus par manque de vent, ou par une méga-dégueulante. A l’époque, les commentaires de Roger m’avaient impressionnés, mais ce n’est qu’avec InterNet que j’ai pu réaliser concrètement la justesse et la validité de ses réflexions. De fait, tous les oiseaux voiliers devant parcourir plusieurs milliers de kilomètres, quelle que soit leur taille ; de l’albatros au sterne, ont en commun une géométrie d’aile remarquable quasi- identique. Le rapport poids-puissance le plus performant étant attribué au martinet, puisqu’il peut atteindre des vitesses de vol en palier de 160 km/h pendant presque une minute. Certains travaux d’ornithologie valent vraiment le détour sur le Net...
En 1997, j’ai pu me voir confier un petit planeur tchèque de chez Supermodel, nommé Rorys. Il se distinguait de tout ce qui se faisait par une forme d’aile inhabituelle, qui s’était révélée très efficace à l’usage. A cette période, en examinant la géométrie de l’aile du Rorys ( martinet en tchèque) ; j’avais calculé une finesse max. théorique de 13.6 avec un taux de chute de 0.65 m/s, alors que Supermodel mentionnait dans sa doc une finesse réelle de 20, couplée à un taux de chute de 0.42 m/s...Cette précision de Supermodel était justifiée par une étude menée pour ce planeur par un professeur tchèque d’aérodynamique. Le fait que les combinaisons géométrie d’aile - winglets procurent un gain de finesse de quasiment 50%, me faisaient penser à un argument plus marketing que technique ; jusqu’à ce que j’essaie le planeur par toutes les conditions météo possibles et déraisonnables et par tous les moyens de mise en œuvre préconisés tels que pente, plaine, sandow ou treuillage F3J ). La correspondance que j’ai pu avoir avec Christian BRONDEL, le concepteur du Crystal grandeur, m’avait conforté dans l’idée que cette géométrie d’aile particulière ne pouvait qu’expliquer cette augmentation de rendement, par une répartition de portance adéquate. Tilt, j’ai déjà lu çà quelque part...Serge BARTH, dans sa chronique sur les ailes Horten, décrivait dans le n°47 de Looping, une approche didactique très bien faite sur le fonctionnement d’une aile à répartition de portance elliptique. De plus en plus intrigué, je me suis mis à surfer furieusement sur le Net, en réunissant une doc exhaustive sur le sujet. Bingo, les étudiants en aéronautique de Darmstadt se sont amusés à faire une synthèse des mensurations de nos volatiles, et ont publié il y a quelques années un rapport décrivant une voilure « idéale », après résolutions de moultes équations 3D. Re-bingo, les concepts de distribution de pression
( valable pour la corde, le dessin du profil, l’envergure et la géométrie de la voilure) issus du travail de Dan SOMMERS, aérodynamicien américain ;sont dispos sur le site du MIT...Banco,la visite du site de Martin HEPPERLE, achèvent de me convaincre d’entreprendre la réalisation de l’Eiger, à voilure basée sur une répartition elliptique de portance visant à diminuer la traînée induite de l’aile, associée à un travail efficace de winglets optimisés. J’ai donc débuté le dessin de cette aile, en utilisant un outil fantastique s’il en est, un modeleur surfacique nommé Xcad .Cette conception ne peut être menée à bien qu’avec ce genre d’outil, car il faut garder à l’esprit que déterminer un profil à un endroit précis d’une aile n’est pas évident, surtout si l’on s’impose au départ une évolution de profil usuelle, que l’on pratique habituellement à tort selon Christian BRONDEL.

Qu’est ce qu’un modeleur surfacique ?

Tout simplement une usine à surface gauche...Imaginez que sur une emplanture vous mettiez un E203 et au saumon un profil creux...Sans cet outil, à aucun moment vous ne pouvez dire qu’elle sera la « gueule » des profils intermédiaires, et par conséquent vous ne pourrez vérifier leurs polaires sous Xfoil, récemment passé dans le domaine public. L’utilisation de cet autre outil n’est pas étranger aux comportement de la voilure de l’Eiger. En examinant les prédictions des performances des profils générés à partir de la répartition elliptique de portance, avec un profil initiateur de départ (qui est ici le HQ 3-15) ; je me suis assuré d’un résultat le plus « sûr » possible, pour la réduction de la traînée induite de l’aile.
En théorie, seule une soufflerie évoluée à écoulement 3D, pourrait valider cette démarche ; puisqu’elle prend en compte non seulement l’aile complète, mais aussi les turbulences de sillage parasites du fuselage, et l’influence des winglets. Excusez-moi, mais j’ai pas çà en rayon...

Les autres outils logiciels :

La phase de calcul primitif, a débutée en utilisant Visuaéro, pour les pré-calculs d’allongement et de surface. Ensuite, il est nécessaire d’utiliser un modeleur surfaçique 3D, afin de dessiner en 3D une génératrice de distribution, qui doit respecter les concepts de nos potaches teutons. L’étape suivante consiste à associer cette génératrice qui est une courbe de type « spline 3D » (ressemblant à la forme d’un cimeterre vu de dessus, et à un ¼ d’ellipse aplatie vue de face); à deux directrices BA et Bdf. Un maillage NURBS est donc réalisé, qu’il suffit de saucissonner pour déterminer des sections de profils. Une transformation en fichiers texte est nécessaire, en usant et abusant d’Excel, pour vérifier sous Xfoil que les profils générés ne présentent pas d’aberrations aérodynamiques, notamment au niveau de la distribution de pression. Je ne vous cache pas que ce travail est long et fastidieux, puisqu’à chaque retouche des profils sous Xfoil, il faut impérativement rebasculer son « super-profil » sous le modeleur 3D, pour redéfinir la prochaine section ; et ainsi de suite. Il m’a fallu environ 3 semaines de pianotage, pour arriver à mes fins ; mais quand on aime, on ne compte pas...La curiosité m’a poussé à examiner la « torture » qu’avait subi le HQ 3-15 de départ sous le module Gdes d’Xfoil, et je dois dire que j’ai été surpris par la comparaison. Il semblerait qu’en fait, au fil de la génératrice, l’on augmente la cambrure, tout en diminuant l’épaisseur relative. Conjointement à ces deux effets, on peut observer une « régulation » qui tend à diminuer la convexité de l’extrados. De plus, avec la forme en flèche AR du dernier panneau, la dernière section observée ressemble du côté du Bdf à un profil « autostable ». Un peu désorienté par ces résultats, j’ai vite fait un tour du côté du Vol à voile, pour essayer de trouver quelque chose qui me rassure, en examinant les ailes du Pégase ou de l’Ask 21. Macache, tout çà n’est pas très catholique ; et ma bidouille risque fort de tourner au vaudeville....


Xfoil, à utiliser avec circonspection...

Je dispose depuis quelques années déjà, des ouvrages que publie Michael SELIG. Dans un de ces bouquins, Michael SELIG nous fait part de certaines réserves quant à l’usage immodéré de Xfoil sous faible nombre de Reynolds. En dessous de 150 000 Re, Xfoil se plante littérallement sur les prédictions de nos chers Worthmann ou autre Eppler...En effet, à faible nombre de Re, des bulles de décollement à rattachement laminaire apparaissent à certains endroits de la corde, qui influencent directement la qualité de la transition de la couche limite, et par conséquent sur le rapport Cz / Cx du profil étudié. D’autre part, l’algorithme de calcul d’Xfoil ( qui date déjà ) intègre une description mathématique des bulles de décollements, et de leurs rattachements ; qui « perturbe » le fonctionnement du calcul de convergence itératif. Le fait que le code d’origine soit en Fortran, avec en prime la superposition des couches successives de codes Microsoft compilées pour arriver aux dernière versions de Windows 9X , il n’est pas rare que l’on arrive ( même en session de calcul sous NT ) à des délires très marrants d’Xfoil qui m’ont déjà pas mal fait rigoler....
La puissance de calcul nécessaire pour la résolutions d’intégrales 3D, ont obligé Mark DRELA, le concepteur du code Fortran D’Xfoil , à simplifier voire approximer le calcul du rattachement des bulles de décollement, qu’elles soient à rattachements laminaires ou turbulents. Cela à comme conséquence immédiate de fausser les résultats des prédictions des profils examinés à faible nombre de Reynolds. Un artifice raisonnable, qui va faire hurler les puristes ; pour avoir une idée des performances de vos profils, est de majorer le nombre de Re d’au moins 20%, en dessous de 150 000 Re . Par exemple, vous voulez tracer une polaire à 100 000 Re, calculez la sous Xfoil à 120 000 Re ; et vous obtiendrez quelque chose qui tient à peu près la route. Mr Reynolds va me voler dans les plumes....Un artifice plus subtil pour contourner le problème, est de simuler une soufflerie à haute turbulence relative qui provoque une transition plus en avant sur la corde étudiée ; consiste à modifier un des paramètres du fichier de définition d’Xfoil, nommé XFOIL.DEF. En éditant ce fichier XFOIL.DEF, il faut alors changer le paramètre Ncrit. Une valeur de Ncrit de 5 simule ce qui vient d’être dit. Une valeur de Ncrit supérieure à 9 simule une soufflerie à faible turbulence relative, et provoque une transition de couche limite plus en arrière sur la corde. A Ncrit 13, la prédiction est juste en ce qui concerne la plupart des profils pour les Cz; mais corrolairement induit des résultats faux en ce qui concerne les Cx en les minorant exagérément. Il suffit pour s’en convaincre de comparer les résultats obtenus en soufflerie par Michael SELIG et son équipe; avec les polaires prédictives obtenues sous Xfoil pour les désormais célèbres SD 7037 ou SD 7032. Cette règle d’utilisation de Ncrit est décrite dans les travaux de R. Evangelista, relatés dans un ouvrage traitant des souffleries à nombre de Re inférieurs à 500 000. Pour en finir avec Xfoil, cet outil ne doit être utilisé qu’en l’état, c’est à dire qu’il ne permet de comparer de manière significative des profils qu’au nombre de Re supérieur à 150 000, mais qu’en dessous, seules les polaires issus de travaux réalisés en soufflerie donnent des résultats qui peuvent servir de règle étalon. Sachez pour information, que les essais de profils Selig et Selig-Donovan ont tous été réalisés sur des échantillons d’ailes rectangulaires d’environ 850mm d’envergure, par environ 305 mm de corde. Ces échantillons ont été construits entièrement soit en balsa coffrées, soit en expansé coffré fini à la fibre. Par contre, si vous envisagez la mise en chantier d’un planeur standard au 1/3 ou plus, Xfoil trouve pleinement sa vocation d’outil de prédiction et de comparaison de performances. Les polaires de profils pourront alors être prises très au sérieux, justifiant le temps passé à examiner les profils dont vous vous demandez ce qu’ils donneront sur votre prochain bébé. Deux modules d’Xfoil sont très utiles pour ce type de démarche, que sont Gdes ( menu de dessin ) et Oper (calcul de polaires), qui évalue les performances. La série de deux articles traitant de leur utilisation a été décrite dans RCM d’ Avril et Mai 2003, et permet de débuter efficacement avec Xfoil. Il faut cependant avoir fait pas mal de DOS, pour y être à l’aise.... Pour faire simple, en dessous de cordes d’aile de 250, oubliez Xfoil tel qu’il est sur le Net ; ou alors faites hurler les aérodynamiciens ( la majoration des 20% de Re) et priez pour que votre planeur s’en moque éperdument...




Les contraintes de la construction :

La contrainte de taille qui limite cet accès aux performances pures, est le mode de construction choisi. Il est évident que reprendre une géométrie complexe est tentant, pour peu que l’on dispose du dernier maillon de la CFAO ; une fraiseuse à commande numérique, seule capable de reprendre fidèlement les entités de surfaces gauches. S’en suivrait la fabrication d’un moule négatif en métal, comme le font couramment les tchèques.
Mais comme moi, « modélistus vulgaris » , vous ne disposez au mieux que de la « secrète », arme favorite des amoureux du polystyrène et autres gabarits. Vous allez me dire que j’aurais pu reprendre les fichiers texte issus de la génération surfacique ; et remettre le bébé à nos amis Jean-Pierre STEPHAN ou Jacques BONNEFOUX, qui se sont concoctés une machine à découper le polystyrène à commande numérique...Que nenni mon ami, il aurait fallu pour cela décomposer chaque demi - aile en au moins 12 panneaux, tous à trapèzes différents et à profils différents....Vous comprenez le problème ? Ensuite, il aurait fallu approximer chaque BA, chaque section de longeron, ect ect...La sagesse, ou plutôt la paresse, m’a restreint dans mes ardeurs, et j’ai opté pour 5 panneaux consécutifs, avec construction de longerons adaptés. Ces longerons sont moulés dans des profilés alu, avec une épaisseur constante, mais à une largeur trapézoïdale dégressive en 5 sections, devant respecter les points d’inflexion maximum des profils générés. Ils sont fabriqués à partir d’un composite de deux semelles balsa de 20/10°, de largeur 24 mm à l’emplanture ; et de 8 mm au saumon. 8 mèches de carbone sont prises en sandwich entre ces deux semelles. Le toutim est imprégné de résine époxy débullée, et mis sous presse ; puis étuvé dans un coffre de CTP, dont le chauffage est obtenu par un radiateur céramique du commerce. Les bavures et les défauts de surface font que la largeur de départ avant finition des longerons doit être supérieure de 5 mm en largeur, et d’environ 8/10° mm en épaisseur. Il faut donc chercher dans les planchettes de balsa des épaisseurs d’environ 22 voire 23/10° selon la densité du balsa choisi. Préférez une densité moyenne, l’époxy migre mieux au travers lors de l’imprégnation ; et assure donc une meilleure transmission d’effort des mèches carbones vers les semelles balsa. L’épaisseur des mèches mouillées avoisine les 3/10°, selon qu’elles sont bien peignées ou non. J’ai en fait suivi, pour la fabrication des longerons, une adaptation de la méthode très bien décrite par Olivier BORDES sur son site InterNet.

Quelques autres trucs de l’Eiger :

Dans la bible des HQ, le Dr. Helmut QUABECK ( concepteur de profils qui ont été champions du monde en F3B avec le modèle de Ralph DECKER EN 1983 ) nous recommande d’utiliser la série des HQ avec des volets dont la profondeur doit être de 22 % + - 2%. Mais un autre impératif, pour profiter pleinement de l’action de ces volets, est de fixer une ligne d’articulation qui doit être perpendiculaire à l’axe du fuselage. Dans le cas d’un bord de fuite en flèche avant, si l’on place une profondeur constante des volets sur l’envergure parallèlement au bdf, on se place alors dans le cas de figure ou l’on détruit cette fameuse distribution de portance elliptique, et à fortiori celle qui ne l’est pas ; lors de l’action des volets. Pourquoi ? Tout simplement par ce que le point de distribution de portance maxi de l’aile se déplace vers l’arrière, d’autant plus que l’on s’éloigne de l’emplanture, et engendre une traînée induite conséquente qui contrecarre le gain de portance donné par l’action du volet. Rigolo, non ?...Ce qui fait que vous vous retrouvez au mieux avec une machine où l’on croit que les volets n’apportent rien, ou au mieux une diminution de vitesse, donc de portance et à l’extrême un décrochage ; et on finit par entendre des rumeurs sur les terrains au sujet des volets qui prétendent que çà n’apporte rien, que le Hq telle série n’aime pas les volets ect, ect...Regardez donc les tout plastique tchèques de F3B ou F3J et en particulier les modèles de Jaro MULLER, le panneau central à volet, eh bien l’axe est perpendiculaire au fuselage...Y’a bien une bonne raison, vous trouvez pas ? Une partie de la réponse se trouve dans les travaux de SCHUMANN, soyeux curieux que diable....D’autre part, il est inutile d’essayer de braquer les volets au delà de 4° à basse vitesse, sous peine de se retrouver avec des AF ...Vous trouverez en annexe, pour une polaire du Hq 3/15 ; c’est édifiant ! Comme je n’ai plus qu’un neurone qui tourne sur trois cylindres, je me suis bidouillé un petit montage économique à base de rotacteur et de potars sur mon émetteur FC 18. Le but est de pouvoir facilement, sans toucher à la programmation de la radio, passer d’une position zéro volets à deux crans de positif, ou d’une position milieu zéro volets à un cran de négatif ou un cran de positif, juste en tournant le rotacteur et les potars. J’en ai pour moins de trente secondes à modifier mes réglages au sol, tout en pouvant les augmenter ou les diminuer et changer la position zéro volet en l’air. Le schéma est fourni, faut juste débourser 7 Euros chez l’electronicien du coin, au lieu des 53 Euros chez Futaba....Dans un autre registre, désirant n’avoir qu’un seul servo par gouverne actionnée, il a fallu que je m’adresse à l’ami Pierre VITO pour disposer de petits modules inverseurs, qui m’ont permis de réaliser des cordons en Y, avec une voie normale et une voie inversée dont le neutre est réglable. C’est un tout petit module qui permet donc, par exemple pour les AF, de pouvoir régler indépendamment le neutre d’un seul AF sans retoucher l’émetteur ; tout en conservant le réglage de course par programmation classique.
A la lecture d’ouvrages dans les langues de Shakespeare et Goëthe, j’ai cru pouvoir naïvement essayer de travailler sur le recollement de ces fameuses bulles de décollement, en apposant des turbulateurs sur les B.A. Malheureusement, les sources de documentation sont assez rares. Une d’entre elles est consultable dans les traités Airfoils at Low Speed de Michaël SELIG ( disponible chez Verlag Technik und Handwerk à Baden-Baden),et une autre sur le site InterNet de Martin HEPPERLE. J’ai réalisé ces turbulateurs en utilisant des filets de masquage 3M , puis en peignant au pistolet entre ces guides. La surépaisseur obtenue après séchage est d’environ 2/10°, ce qui correspond aux recommandations minimum de Michaël SELIG. J’ai utilisé comme support de peinture du film à plastifier en 6/100° ( poncé pour l’accrochage), que l’on trouve en rouleau chez les reprographes. Le comportement à basse vitesse est assez décontenançant, puisque le planeur ne décroche pas mais s’enfonce de manière spectaculaire à plat, sans aucune efficacité à la profondeur (ni à cabrer ni à piquer ) et chute lentement malgré une charge alaire assez élevée. Çà m’est arrivé plusieurs fois en vent arrière, et la seule solution pour lui faire replonger le nez, est de passer en braquage négatif au volet ; et de bourrer à piquer simultanément pour lui refaire reprendre de la vitesse. Mon premier réflexe avait été de vérifier le centrage, mais le planeur devenait vraiment méchant en spirales serrées en centrant arrière ; à haute altitude en plaine n’était plus du tout confortable et prenait très vite de la vitesse dans des montagnes russes dignes d’Europa-Park...En centrage avant, il devenait peu fin ; comme d’ab. Pour finir, j’ai peint une déco définitive qui simule un motif de montagne et doit faire office de « pseudo-turbulateurs ».... M’enfin ?.....
Tout au long de la saison, deux choses se sont cependant confirmées : le planeur est très gratteur, très fin (pour peu que l’on se donne la peine de pousser sur le manche...), et est capable d’écarts de vitesse impressionnants, avec une restitution « linéaire ». Ce qui serait intéressant serait de pouvoir comparer cette voilure, avec sa copine équipée du Hq 3-15 de base, mais traditionnelle, avec la même surface et le même allongement. C’est à mon avis la seule démarche objective pour vraiment savoir si mes bidouilles informatiques apportent quelque chose de nouveau dans le monde très narcissique de notre hobby...Traduction, avant de me gausser de quoi que ce soit ; j’aimerais bien que quelqu’un d’autre s’y colle....




Bizarre, vous avez dit bizarre ?

J’ai pu remarquer, à la fois en tant que spectateur et en pilotant des planeurs de plus de 4.20m, plusieurs choses qui m’interpellent. Lorsqu’on observe en vol des grands planeurs chargés à plus de 70 gr/dm2, et équipés de profils d’au moins 15% d’épaisseur relative, on peut voir que la vitesse de vol n’est pas si élevée que çà ; et que les performances dans le petit temps sont assez étonnantes... Lorsque l’on compare les charges alaires des modèles réduits et celle de leurs cousins grandeurs, on voit bien que l’on ne joue pas dans la même cour, puisque certains tout - plastique grandeurs allemands flirtent avec les 500 gr/dm2. La charge alaire ne faisant que déplacer la polaire sur l’axe des vitesses, en conservant la même finesse, que peut bien t’il se passer d’autre ? Y’aurait t’il un rapport liant nombre de Re, charge alaire, épaisseur relative ; qui interviendrait dans le rendement du profil? Of course, my God ; c’est la vélocité. Amusez-vous à surfer autour des sites traitant des hélices APC, c’est très instructif...Vous serez surpris de savoir sur quoi bossent les designers des batteuses ricaines...Comparez donc deux grands planeurs identiques volant ensemble dans les mêmes conditions météo, l’un chargé comme d’ab, et l’autre avec par exemple 1.5 kg de plus. Rien à voir avec les ballasts des suppositoires de F3B équipés de profils à 8.5%, comparons ce qui est comparable. C’est le genre de truc que j’attends de voir avec impatience, ce qui m’amène à vous parler de mon prochain projet.


Retour sur les laminaires :

Gérard Royal avait fait en 1975 un pari audacieux s’il en est, équiper son ASW 17 de 5 m d’un profil laminaire. Les résultats furent plus que probants, car le planeur, piloté de main de maître, se montrait très fin. Je l’ai vu remonter du trou à Echevannes, et je me suis longtemps interrogé avec mon père ( et bien d’autres ) d’où pouvait bien provenir cette finesse, même à faible vitesse. L’allongement de 28, grande nouveauté pour l’époque, y était évidemment pour beaucoup, mais cela n’expliquait pas tout...J’ai donc racheté le moule de Gérard avec une idée bien précise en tête : m’en cogner deux, avec les deux mêmes géométries de voilure mais à profils différents. L’un avec le royal laminaire et ses évolutions progressives ; et le second avec un profil « classique », par exemple le Worthmann Fx 84 W 175. Cela devrait théoriquement me permettre d’observer objectivement la différence de comportement, ce qui à mon humble connaissance n’a jamais été fait, en particulier par ces gars qui écrivent sur leur site InterNet, qu’utiliser des profils laminaires en modèle réduit est une hérésie, mais reconnaissent du coin des lèvres qu’ils ont constaté ( toujours sans les essayer eux-mêmes ) que ces profils laminaires, pour la plupart issus de planeurs grandeurs ; ont un excellent rendement que ce soit à faible ou fort nombre de Re. Cette affirmation doit, à mon humble avis, être plus développée. Elle est correcte si l’on se place dans la cas de figure de planeurs dont la majeure partie de la voilure travaille en dessous de 250 000 Re. Dans cette situation, aucun laminaire ne pourrait marcher théoriquement correctement ; et seuls les profils étudiés spécialement pour le modèle réduit conviennent. A contrario, si la plus grande partie de la voilure travaille au dessus de 300 000 Re, un laminaire évoluant vers un profil adapté peut donner de meilleurs résultats qu’un profil classique. Une solution pour apporter de l’eau au moulin des laminaires, serait de pouvoir étudier correctement en soufflerie un planeur à l’échelle 1/3 voire ½, afin de se munir d’éléments concrets de comparaison. C’est en fait un vieux et passionnant débat d’école qui pimente régulièrement les discussions de terrain. Les quelques outils logiciels dont nous disposons ( Xfoil en est un exemple démonstratif ), pourront peut-être nous permettre d’avoir une approche un peu moins empirique qu’à l’ordinaire ; et nous orienter vers une démarche systématique plus « scientifique » sur ce débat qui n’a pas fini de nous surprendre. Ce ne sont certainement pas des impressions subjectives de pilotage qui pourront nous faire progresser en aérodynamique pure...Si d’aventure un grand planeur vous tente, le moule de l’ASW 17 dont je dispose dorénavant, peut engendrer des planeurs jusqu'à 6 m d’envergure, je ne serais pas mécontent de trouver quelques fondus de vol à voile qui feraient renaître l’esprit de recherche et de curiosité de l’époque qui animait ces planeuristes très conviviaux ; qui avaient créée, si je me souviens bien, le G.R.P.R, pour Groupe de Recherche en Planeurs Radio-commandé. La seule contrainte que je fixerai aux intéressés , sera un engagement de me communiquer les caractéristiques des planeurs terminés; avec les profils utilisés et les géométries des voilures. Pour votre information, les coordonnées du FX 84 W 175, et du karman d’origine sont fournies ; avec les polaires idoines. D’autre laminaires « d’allure sympa » pourraient être utilisés, notamment les séries d’Eppler 654 à 657. Bien évidemment la désormais célèbre série des FX 6xxxx et FX6Kxx trouverait sa place dans cette étude ; sans toutefois perdre de vue que par exemple les Fx 60-126 ou Fx 62 K 131, datent d’avant les années 70 ; et qu’il serait plus judicieux à mon sens d’aller piocher dans les polaires des séries des Fx 83 et Fx 84.Un autre truc intéressant serait, au sein de la FFAM, d’élaborer un sujet de stage complet pour des étudiants en aéronautique, qui devraient plancher sur une étude concrète, à partir d’un fuseau donné, sur l’optimisation des performances d’une voilure ; sa réalisation, et les essais en vol. Ce pourrait être une expérience enrichissante pour toutes les parties concernées, qui pourrait déboucher sur des progrès significatifs en modèle réduit. L’on peut suivre ( par exemple ) la voie ouverte aux USA par Michael SELIG et ses étudiants, pour se convaincre que ce style de démarche est loin d’être une douce utopie d’un planeuriste de province...

Pourquoi ce nom d’Eiger ?

L’Eiger, est un massif des Alpes Suisses. Cette paroi est une des plus dangereuses qui existe en Europe. J’ai donné ce nom à ce planeur, pour la simple raison que j’ai du réaliser une escalade pas évidente du tout...Je veux parler de cette descente aux enfers que j’ai vécu en 2000 ; où j’ai perdu pied, les vicissitudes de la vie m’ayant carrément pété à la gueule; jusqu'à me faire perdre la raison, et terminer cette descente vertigineuse en étant interné de force en milieu psychiatrique...Beaucoup de gens autour de moi ont eu très peur, plus dérangés dans le trouble de leur confort individuel que par la crainte de ce qui pouvait m’arriver. Peu de personnes ont compris, bien peu ont eu le geste salvateur...Ceux qui m’ont soutenu, et me soutiennent encore se reconnaîtront, ils tout simplement été là... Avec beaucoup d’humanité, en toute simplicité, ils m’ont empêché de crever dans l’indifférence ; le mot n’est pas trop fort... Le long réapprentissage de la vie qui s’en est suivi s’est axé autour de la réalisation de l’Eiger. Toute une ascension, je vous dis ; avec à chaque jour des envies de meurtre envers les ragots calomnieux d'un clan de croquants à la sauce Thénardier, qui déversent leur propos xénophobes et racistes sans même sans rendre compte....La construction de ce planeur a été une excellente thérapie, et j’ai aujourd’hui pleine confiance en l’avenir, le sourire aux lèvres devant ces primates jacassants, impuissants à se réaliser eux-mêmes... Je terminerai mes élucubrations sur ces quelques mots :

Je te dédie l’Eiger, à toi, modéliste de VGM ; qui a dévissé de la paroi sans crier gare, et qui a coupé la corde doucement, sans faire de bruit ; comme un premier de cordée.... Pourtant, tu sais, la montagne est si belle, vue d’en haut....

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