Posté le 24 août 2019
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‘’La domination politique ou la réponse à la question « pourquoi, étant de droite, suis-je excité à l’idée de décoller des affiches de mon candidat par -5 degrés sous les ordres d’un militant anarcho-communiste ? ».,,

Par Sven Øllavsen

En effet, drôle de question que celle-ci et je parie que vous ne vous l’êtes jamais posée. Rares sont ceux qui, en France, connaissent ce kink provenant droit des États-Unis et né (plus ou moins) lors de la victoire de Donald Trump à la Présidentielle de 2016. J’évoquais d’ailleurs assez partiellement ce sujet dans mon article « Les machos sont de retour » publié dans le numéro 312 de Hot Vidéo.

Ainsi avons-nous pu assister à la naissance de comptes Tumblr liés à la vénération des MAGA (militants Trumpistes) par de jeunes « libtards » (appellation injurieuse servant à qualifier les libéraux souvent Démocrates) supposément homosexuels, intellectuels et j’en passe...

De là, en plus d’évènements personnels assez tragiques, est né chez moi cette tendance à apprécier ce genre de kinks dégradants. C’est devenu d’autant plus vrai après la campagne présidentielle de 2017, particulièrement agressive et négative qui a vu s’affronter « centristes progressistes » et « gauchistes anti-système » (pour résumer les choses simplement) dans un combat à mort pour déterminer qui aurait l’honneur de défier celle que personne n’a seulement songé à déloger : Marine Le Pen.

Il me fallait un exutoire, un moyen de rationaliser cette violence, d’en faire mon jouet, et c’est ainsi que j’en suis venu à chercher cet extrait de réel empoisonné à doses curatives afin d’expurger tout le mal, toute la haine qui me collait à la peau et qui - encore aujourd’hui - me fait crever de tristesse et d’amertume, chancre freudien qui me pourrit la vie autant qu’il la rend savoureuse.

I. Grands principes de la domination politique.

A. La transformation idéologique.

La domination politique se divise en deux grands objectifs distincts : la transformation et la complaisance idéologique. Il va sans dire que, dans tous les cas, le second état est bien plus durable.

La transformation idéologique est ce principe selon lequel le partenaire soumis doit être dans une démarche de changement d’opinion. Il aura alors pour ambition d’adhérer à l’idéologie de son dominant et donnera à cette dernière une grande place dans sa vie.

Si le dominant est d’extrême gauche (si nous prenons pour exemple un échiquier politique classique), le soumis pourra proposer de financer un voyage ainsi que des entrées pour La Fête de l’Huma’ (exemple vécu). Il s’attachera à participer aux activités et à vider son esprit pour laisser place à ce qu’il désire que son Maître y fasse rentrer. Il travaillera, tout en revoyant sa conception du monde et de la société, à « réparer » ses précédents votes.

La domination politique étant un sujet complexe, de nombreuses autres ramifications telles que l’aspect religieux, identitaire, social (avec tout ce que cela peut avoir d’idéologique) peuvent et doivent être envisagées. Varier les plaisirs est de bon ton même s’il conviendra de demeurer sur un axe principal et de ne pas trop s’éparpiller, quitte à casser la magie.

B. La complaisance idéologique.

C’est de loin l’aspect le plus intéressant des deux et surtout le plus durable. À moins que le dominant ne soit un partisan de la loi du talion (c’est tout à fait possible, exemple vécu) et ne cherche à vous punir de vos votes tout au long de votre relation, il est évident qu’il se lassera et vous abandonnera là où il vous a laissé après votre « transition ».

La complaisance idéologique est cet état dans lequel le dominant ne cherche pas à faire évoluer son soumis mais à le punir et à l’humilier continuellement en tant qu’opposant politique.

Cela dit, une solide connaissance de l’histoire politique et de l’idéologie en question devraient rendre vos jeux plus savoureux. Vous pourrez y puiser quelque verbe fleuri et autres humiliations sorties tout droit de la révolution culturelle. Dans le cas contraire, surtout si votre partenaire se définit comme un « vanilla », vous risquez de vous ennuyer et d’aller voir ailleurs (c’est aussi du vécu).

II. Trouver le partenaire de jeu idéal (à l’usage des soumis).

C’est peu dire que d’affirmer qu’il faudrait un miracle pour qu’un dominant vienne naturellement se présenter à vous. Cette pratique étant peu répandue et le nombre de candidats assez réduit, il va vous falloir mettre la main à la pâte et vous lancer dans de longues et fastidieuses recherches.

Pourtant, la rareté ne signifie pas pour autant que vous devez vous contenter du premier venu. La plupart du temps, il vous faudra initier vous-même votre dominant à cette pratique (dans 90% des cas en ce qui me concerne). Les profils sont divers et vous devrez avant tout et surtout vous constituer une relation sérieuse avec une personne de confiance. C’est un voyage qui se fait à deux. Si le plaisir est à sens unique, ça ne marchera pas. La personne vous donnera ce que vous voulez pendant deux jours pour vous faire plaisir et elle vous abandonnera (c’est du vécu, encore). Voilà pourquoi, il faut souligner qu’un travail de séduction, d’explication et d’excitation doit être faire par vous au contact des non-initiés (qui sont les meilleurs dans ce domaine sans même s’en rendre compte, je le sais d’expérience).

Logiquement, vous chercherez une expérience intense avec une personne ne jouant pas un rôle. Il ne s’agit pas ici de « simuler une idéologie ». Ça n’aurait aucun intérêt. Chercher votre partenaire sur des réseaux spécialisés comme Recon est donc exclu. Vous ne tomberez que sur des dominants BDSM classiques qui joueront le jeu pour vous faire venir chez eux. Vous aurez perdu votre temps et c’est tout.

Grindr est plus indiqué si vous cherchez une personne de gauche (quand bien même est-il possible de dénicher certains profils très à droite). Guettez les cheveux frisés assumés et les crinières abondantes. Statistiquement, vous êtes assuré de doubler vos chances de trouver votre partenaire (pourvu qu’il soit dominateur) en vous focalisant sur ce profil.

Vous pouvez d’ailleurs vous focaliser sur les profils de twinks décolorés et autres artistes queers, souvent ouverts au sado-masochisme et aux concepts farfelus.

En dernier ressort, je vous conseille de vous abonner aux différents groupes et pages facebook antifa, anarchistes, communistes, insoumises et tout ce qui s’en suit. En écumant les commentaires, vous devriez trouver votre bonheur. Attention, cependant, préférez les personnes ayant la même orientation sexuelle que vous. Mon taux d’échec est de 95% en approche tactique de gauchistes hétéros. Même s’il ne s’agit pas ici de coït anal ou buccal, votre compagnon sera plus ouvert à ce sujet s’il est lui-même homo ou bi.

Bien-entendu, il vous faudra de l’entrainement et vous essuierez de nombreux échecs mais vous parviendrez à surmonter les obstacles et à trouver ce que vous cherchez en persévérant ! De toutes manières, votre recherche devra également se baser sur des critères très précis définis par vous. Il ne s’agit pas d’organiser quelques plans « boff-boff » avec des mecs qui vous plaisent à moitié. Jouer avec un homme qui vous convient parfaitement vous aidera à faire durer le plaisir.

III. La domination politique expliquée.

Dans son Psychopathia Sexualis, Richard Von Krafft-Ebing définissait ce que nous connaissons aujourd’hui comme la soumission masochiste (du nom de l’écrivain Leopold von Sacher-Masoch). Lui-même s’en est tenu à la très stricte définition du masochisme. Ses ramifications et sa complexité sont restés inconnues durant de nombreuses années et, cette sexualité étant en perpétuelle évolution au fil du changement de notre société et de nos rapports sociaux, il n’est pas toujours facile d’être à la page des nouvelles inventions telles que la Domination Politique qui, pourtant, s’est déjà manifestée à travers le fantasme de l’homme politique et des hommes de pouvoir en général.

Pourtant, en ce qui concerne la Domination Politique, il ne saurait être question de pouvoir au sens électoraliste du terme. C’est même tout l’inverse. S’il est possible de flairer un gros poisson et de devenir le soumis d’un président d’association (pour avoir fantasmé là-dessus, je peux également dire que c’est du vécu), se diriger vers un élu nous fera sortir du cadre de la domination politique. En effet, je définis cette dernière comme étant un strict rapport de militant à militant.

Pour en revenir à notre point, il n’est donc pas possible, à ce stade, d’expliquer clairement les raisons pour lesquelles certains succombent à la domination politique. Cependant, certains indices nous permettent de développer quelques hypothèses.

Premièrement, il est intéressant de remarquer que ce fantasme de militant à militant est bien plus répandu aux États-Unis, au Brésil et qu’il commence à faire son trou en Italie. Quel est le point commun entre tous ces pays ? Ils sont tous dirigés (à l’heure où j’écris ces lignes) par un chef d’état populiste arrivé au pouvoir dans la douleur.

Aussi, à mon humble avis, comme de nombreux kinks, l’attrait pour la domination politique doit-il résulter d’un traumatisme et, comme je l’ai dit en introduction, d’une volonté de rationaliser ces rapports violents qui sont en train de se normaliser dans notre société.

Cet attrait serait aussi un appel à lâcher prise dans une soudaine poussée de nihilisme. La volonté de désacraliser la chose politique, d’en faire une farce, une caricature, une comédie dans laquelle on est acteur et qui n’aboutit qu’à l’anéantissement. C’est aussi faire une parallèle avec la théorie du déclin de la civilisation en se rendant à la sauvagerie, en consentant à ce que disparaissent les idées et à être formaté pour ne plus souffrir. C’est un peu l’euthanasie sexuel.

À lire :
-> Le Cahier Noir (Olivier Py).
-> En finir avec Eddy Bellegueule (Edouard Louis).
-> Psychopathia Sexualis (Richard von Krafft-Ebing).

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