La glace régnait en maître dans cette contrée. Les branches des arbres ployaient sous son poids et les fleurs ne montraient jamais le bout de leur nez ici. Phy sentait la neige rouler sous ses chaussures mais le froid ne la dérangeait pas. Elle ne s’était jamais aussi sentie vivante que lorsque ses poumons se remplissaient d’air froid. Le silence l’apaisait, le blanc aussi. Du bout des doigts, elle caressa le tronc d’un arbre. Aucun oiseau ne chantait, pas l’ombre d’un loup. Tout avait l’air en suspens. Sa respiration résonnait étrangement dans ce calme, elle n’osait le briser. Soudain, quelque chose remua dans l’atmosphère. Ce sentiment de malaise s’insinua en elle comme un serpent sous sa peau, il lui enserra le cœur. Phy en étouffa presque. La mort l’appelait, il fallait la trouver avant que ce soit trop tard. Ses pieds la menèrent d’eux-mêmes à la source. Le vent lui pinça les joues, la neige manquait de la faire glisser. Le paysage n’avait rien de rassurant, elle craignit à chaque pas de croiser sa fin. Un râle de douleur s’éleva. Entre plusieurs hauts arbres, allongé sur le sol, la créature la regarda longuement. Un de ses frères avait été blessé. Son pelage brun était recouvert de sang, la neige en avait été souillée. Phy se laissa tomber à côté du cerf. Les yeux noirs de la bête ne lâchaient pas les siens. Comme s’il cherchait un dernier réconfort. Elle passa ses doigts entre ses yeux. De l’air chaud s’échappa de ses nasaux. Il tremblait de douleur. Hésitante, elle posa une main tremblante sur la blessure. L’animal frémit. Il souffrait. Phy ferma les yeux. Elle pouvait l’aider, elle le savait. C’était pour cela qu’elle était là, pour aider l’un des siens.