Ouest-France
David GUÉZENNEC.
Publié le 02/02/2024 à 15h20


Grégory, vous avez été très sollicités, mais gardez l’essentiel de vos forces vives…

On avait la volonté de garder nos meilleurs éléments. C’est la première fois où, dans un mercato hivernal, on a été autant attaqués. C’est valorisant car ça veut dire qu’on a de bons joueurs, c’est lié aussi à nos résultats. On s’attendait à ça, l’inverse aurait été inquiétant. Un mercato réussi, c’est savoir garder ses bons éléments. On a su résister à des propositions très intéressantes et acceptables pour le budget d’un club comme le Stade Brestois. Mais on voulait aussi être dans la continuité pour faire une belle saison. J’avais dit au staff qu’on ferait tout pour garder cette équipe compétitive. On l’a réussi.

L’été dernier vous étiez obligé de vendre Franck Honorat. Vous n’aviez pas d’obligation de vente cet hiver…

L’été dernier, vendre était vital. La vente de Franck était prévue pour ça (10 millions d’euros à Mönchengladbach). Cet hiver, on n’avait pas ce besoin-là. On s’est donc senti sereins et on a pu résister aux offres. Contrairement à ce qui a été dit par quelques malins, ce n’est pas pour jouer l’Europe qu’on ne se sépare pas d’eux, mais car on a juste la volonté de voir où nous mènera ce qu’on fait depuis le début de saison.

Votre président avait laissé la porte ouverte à un départ de Lilian Brassier cet hiver, il n’y a pas eu d’offres à hauteur ?

On aurait été à l’écoute. Mais il faut des offres qui puissent nous convaincre à un départ. Et j’ai dit à ces clubs-là (Stuttgart s’est positionné au dernier moment) qu’on n’attend pas les 48 dernières heures pour se mettre à table et discuter pour faire un transfert.

Garder vos meilleurs éléments signifie-t-il que le club franchit un cap ?

Quand on n’a pas l’obligation de vendre c’est plus simple, mais c’est dur de refuser à un joueur sollicité, qui peut gagner plus d’argent, de partir. Mais oui, on montre qu’on est capable de refuser des offres qu’on n’aurait pas pu refuser dans d’autres contextes.

« Vendre un joueur ne veut pas dire qu’on va se démunir »
Y aura-t-il un ou deux bons de sortie cet été ?

Il est bien, dans notre modèle économique, de pouvoir vendre un joueur. Ça ne veut pas dire qu’on va se démunir. Quand on recrute un jeune joueur, l’idée c’est de le développer et de lui faire franchir un cap pour qu’il puisse aller dans un club supérieur. On le fait depuis 4-5 ans, ça ne veut pas dire que l’équipe n’est pas compétitive. Après la vente de Franck Honorat, tout le monde disait qu’on allait être les premiers à descendre, on était presque déjà en Ligue 2. Là je ne sais pas si ça va continuer mais on est 3e et on fait une belle saison. Oui, on vendra un joueur chaque année dans le modèle qui est le nôtre. Cet été, il y aura sûrement un départ. Mais peut-être pas deux ou trois car l’idée n’est pas de se faire piller nos joueurs. On a un projet dans la durée. Mais il faut aussi comprendre que des joueurs veuillent évoluer dans leur carrière et voir autre chose sportivement et financièrement. On l’accepte.

Certains ont-ils demandé ce bon de sortie cet été ?

Je peux l’entendre, mais les joueurs sont sous contrat. Il faudra que toutes les parties soient d’accord pour qu’on réalise un transfert. Je ne suis pas pour retenir les joueurs mais des fois les timings et les situations sont complexes. Tout est question d’équilibre.

Les droits tété vous laissent-ils encore dans l’incertitude ?

C’est compliqué d’anticiper en effet sans lisibilité sur les droits télé. Je m’adapte. Mais avec ce que j’ai connu cet été… (quasiment aucune enveloppe recrutement). On patiente.

Cet hiver vous avez fermé la porte à un départ de Pierre Lees-Melou que vous estimez au cœur du projet…

C’est dur de refuser des offres pour un joueur d’un certain âge avec des conditions très différentes pour lui. Mais il est au cœur de notre projet de jeu, un élément essentiel dans ce que souhaite mettre en place le coach. Il y aura un après Pierre Lees-Melou. Mais on veut continuer avec lui. On a prolongé son contrat. On veut le garder et faire un bout de chemin ensemble. Après, ce qu’il adviendra par la suite…. Mais refuser certains montants en décembre (10 millions d’euros du Stade Rennais) et accepter un montant différent cet été le concernant serait illogique. On discutera, on échangera. Je comprends que ça a été difficile à accepter pour lui. On espère se tourner vers l’avenir avec lui.

Il le vit comment ?

Là je le trouve concerné, motivé et professionnel. Oui, c’est sûrement marquant et impactant, peut-être que ça le perturbe encore, mais Pierre est un garçon intelligent et sait faire la part des choses.

Bradley Locko est regardé aussi de près…

C’est un garçon qui continue son évolution. Il a pris très vite la mesure de son poste. Il a un potentiel, mais encore beaucoup de progrès à faire. Ce sont des postes très durs à trouver (latéral gauche gaucher), très recherchés, donc on a envie de le garder et il a encore trois ans de contrat chez nous. Je ressens qu’il peut encore continuer à progresser chez nous. Ça me fait penser à Lilian (Brassier) qui progresse chaque année à Brest et qui est sollicité aujourd’hui par des grands clubs européens (Milan AC, Porto, Stuttgart…). Si Bradley continue sa progression, des choses arriveront aussi pour lui. Il faut qu’il se concentre sur sa deuxième partie de saison et on verra pour la suite.

Achraf Dari est prêté à Charleroi…

Dans la construction d’un effectif, on envisage toujours 4 défenseurs centraux et il y en a toujours 3 qui se partagent le poste et un quatrième qui est dans une rotation. Nous, on a quatre défenseurs centraux qui peuvent jouer autant les uns que les autres : Lilian (Brassier), Brendan (Chardonnet), Ju (Le Cardinal) et Achraf. Et Achraf n’a joué que 114 minutes sur 6 mois, ça fait 7 % de temps de jeu, je peux comprendre qu’à son âge (24 ans), en étant international marocain, il ait envie de pouvoir jouer et progresser ainsi. Il acceptait l’idée d’être dans la rotation et d’avoir perdu sa place, mais était malheureux. Il voulait du temps de jeu, on lui a donc ouvert la porte. Il aura du rythme, enchaînera. Pour nous, à trois est-ce que ce sera suffisant ? Si on regarde les six premiers mois de la saison, oui. On préfère donner du temps de jeu à quelqu’un qui voulait partir plutôt que de garder quelqu’un qui ne serait peut-être pas prêt mentalement. On a fait un prêt sec car Achraf veut partir pour revenir plus fort. Il devrait être avec nous à la reprise l’année prochaine.

Vous avez aussi prêté Josué Escartin…

Il a eu l’opportunité d’Ajaccio en Ligue 2, on n’allait pas la lui refuser alors qu’il jouait tous les week-ends en Régional 1 (en réserve). C’est bien pour sa progression.

« J’ai dit à Eric : ’’tu peux rester tranquille’’»
Marco Bizot a été sollicité en fin de mercato…

Oui, un club de premier League (Nottingham Forest) est venu aux renseignements, ça aurait été illogique de refuser un bon de sortie à Pierre (Lees-Melou) de ne pas accéder aux demandes pour Lilian (Brassier) ou Bradley (Locko) et de laisser partir Marco qui est un élément important. J’ai dit à Eric “tu peux rester tranquille, ton groupe ne changera pas, les meilleurs éléments resteront chez nous”. Donc on a poliment fermé la porte.

Vous recrutez Antonin Cartillier en prêt…

Avec l’arrivée d’Antonin, on avait la volonté d’avoir encore quelqu’un sur le poste de latéral gauche car Jordan (Amavi) est blessé et qu’on ne sait pas quand il va revenir. On voulait un autre défenseur, au profil différent. On prend un jeune qui a montré de belles choses dans différentes catégories. Il est déjà depuis un an avec les pros de Monaco. On veut voir comment il se comporte et peut-être préparer et anticiper la suite. C’est comme Bradley (Locko), l’année dernière quand on l’a fait venir. On ne lui avait rien promis. Il avait fait trois titularisations et quelques apparitions, ça ne nous a pas empêchés de vouloir le conserver et de l’intégrer dans notre projet. Avec Antonin, on sécurise le poste avec un gaucher dans l’effectif (où on n’a que Bradley, Lilian et Jordan). On discutait depuis quelques temps avec Monaco mais avec Jakobs à la Can et seulement Ouattara disponible, ils souhaitaient le conserver et je ne suis pas sûr que si le Sénégal était encore qualifié (à la Can), il serait avec nous. Monaco sait qu’on a un intérêt à se projeter pour l’avenir avec lui.

Le coach a d’excellents résultats, va aussi être dragué certainement ?

Quand on a des résultats, qu’on parle de Brest en positif, on s’intéresse forcément aux gens qui sont à la tête du projet. C’est normal et par illogique. Le coach est content chez nous, je pense que pour lui comme pour nous, ce n’est pas du tout un sujet. On finit la saison et on verra ce qui se passe par rapport à tout ça. On est content du travail qu’il fait depuis un an. Quand je l’ai choisi, beaucoup de gens étaient très sceptiques, je peux le comprendre, mais j’ai sur le moment trouvé nos supporters très durs, sans lui donner la chance, ils l’ont d’abord critiqué. Il faut laisser du temps, avoir de la patience, fermer sa bouche et parler quand il le faut. Eric a réussi à faire taire beaucoup de personnes. Il montre qu’il est un entraîneur qui correspond à ce qu’on veut faire, à l’image qu’on veut donner. Si je lui ai donné sa chance, c’est parce que j’ai ressenti que c’était l’entraîneur dont on avait besoin par rapport au groupe, à l’instant T. Je connais mon vestiaire, je savais de quoi il avait besoin. Il correspondait parfaitement à ça et ça a instauré sa dynamique, je ne veux pas non plus oublier le travail que font aussi tous les adjoints, ça n’a pas été simple pour eux non plus quand je leur ai demandé de répondre (Lachuer, Grougi, Bourgis, qui ont suppléé Der Zakarian). Du staff médical, des ménagères aux intendants à tout le monde qui travaille à Kerlaurent, il y a une vraie unité qui fait qu’on est dans le positif. Évidemment, avec Eric on a envie que ça continue et voir jusqu’où l’équipe peut nous amener. Le discours ne changera pas, ça dépendra donc des joueurs.