Posté le 22 juin
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Comment les autres grands pays européens négocient leurs droits TV
Alors que la LFP patine pour trouver un accord pour ses droits TV domestiques et a présenté ce vendredi sa chaîne 100 % Ligue 1, les autres pays du Big Five sont-ils confrontés aux mêmes difficultés ?

Max Drodelot
publié le 22 juin 2024 à 11h30


Le flou total dans lequel est plongé le football tricolore alors que les discussions entre la LFP et Canal+ patinent, serait-il une spécificité française ? Si tous les grands Championnats européens sont confrontés à une période financière délicate, due notamment à l'inflation, ils ont néanmoins gardé de bonnes relations avec leurs diffuseurs historiques, ce qui joue ne leur faveur. Petit tour d'horizon.

Accord record pour l'Angleterre
Si la France a été obligée de revoir les montants de ses droits TV domestiques pour la période 2024-2029 à la baisse, la Premier League est dans une dynamique opposée. Lors des dernières négociations avec les diffuseurs pour la période 2025-2029, conclues en décembre 2023, elle a signé un accord record en obtenant 6,7 milliards de livres sterling au total (7,9 milliards d'euros), soit 1,3 milliard de livres par an (1,5 milliard d'euros). Réparti entre ses diffuseurs historiques Sky Sports et TNT Sports, nouveau nom de BT Sports, le montant est supérieur de 4 % à celui obtenu pour la période actuelle (environ 5 milliards d'euros).
Évidemment son « produit » est bien plus attractif que celui de la Ligue 1 et l'Angleterre dispose culturellement d'une population plus intéressée par le football qu'en France, mais le fait d'avoir toujours su garder auprès de soi son diffuseur historique Sky Sport, qui a obtenu un minimum de 215 matches par saison (52 pour TNT) à partir de 2025 aide forcément dans les négociations.
En plus de ses droits domestiques, la Premier League dispose d'un filet de sécurité avec ses droits internationaux, le Championnat étant particulièrement attractif à l'étranger. « Aux États-Unis, la Premier League se vend même plus cher que la MLS », explique Luc Arrondel, économiste du sport et directeur de recherche au CNRS (Centre national de la recherche scientifique). Pour la période actuelle par exemple, les droits internationaux de la Premier League sont plus élevés que ceux domestiques (6,3 milliards de livres contre 5,5 milliards). Du jamais vu.

L'Italie a amoindri le choc

Nos voisins transalpins aussi ont connu une période d'incertitude lorsque la Ligue italienne de football a annoncé en juillet dernier ne pas avoir reçu d'offre adéquate pour la diffusion de ses droits TV domestiques pour la période 2024-2029. Une bonne partie des observateurs s'attendait alors au pire et à un montant revu nettement à la baisse alors que les dernières négociations avaient abouti à un montant de 930 M€ annuels. Mais la Ligue a su amortir le choc et obtenir un accord en octobre autour de 900 millions d'euros par an par le gré à gré avec DAZN, devenu son partenaire numéro 1 depuis 2021, et son diffuseur historique Sky. La plateforme de streaming alignera 700 M€ annuels pour obtenir sept matches exclusifs par journée de Championnat et co-diffusera les trois autres avec Sky, qui avancera 200 M€ annuels. Le tout pour 4,5 milliards d'euros sur cinq ans.
Comme d'autres pays européens, tels que l'Angleterre, l'Espagne ou encore les Pays-Bas, l'Italie a augmenté la période de diffusion de deux ans afin d'assurer plus de stabilité. Si la Ligue italienne a misé sur la continuité en ne changeant pas de diffuseurs, elle a tout de même osé une petite nouveauté. Elle a accepté un mécanisme de partage des revenus de DAZN en fonction des recettes liées au nombre d'abonnements à la plateforme. Concrètement, plus le « Netlix du sport » gagnera en abonnés, plus les clubs italiens bénéficieront d'un bonus financier.

En Espagne, la paix sociale et l'ombre de Mediapro

La ligue de football espagnole a acheté la paix sociale pour les droits TV de la période 2022-2027, en cours. Les négociations avaient accouché en décembre 2021 sur un accord 50-50 entre Movistar, le partenaire historique de la Liga qui diffusait 100 % des rencontres du Championnat auparavant et DAZN, le nouvel arrivant rempli d'ambitions. Les deux diffuseurs ont obtenu cinq matches par journée de Championnat, un Clasico chacun et ne peuvent pas diffuser le match aller et le match retour d'une rencontre du Real Madrid ou du FC Barcelone contre Valence, l'Atlético de Madrid, l'Athletic Bilbao ou encore le Séville FC. Le tout pour environ 990 millions d'euros par an, soit dix de plus que le dernier contrat et 5,9 milliards d'euros au total.
L'arrivée de DAZN a tranché avec les habitudes espagnoles. Cela résulte d'une stratégie de la Ligue espagnole d'attirer de nouveaux diffuseurs. « Plus vous avez d'acteurs, plus vous pouvez augmenter les prix et faire marcher le jeu des enchères », détaille Arrondel. En 2021, outre DAZN et Movistar, la société Relevent Sports avait répondu à l'appel d'offres, tout comme... Mediapro. Bien connu en France pour avoir obtenu les droits TV de la Ligue 1 avant d'abandonner ses lots en 2021, faute de pouvoir payer le contrat de 850 M€ par saison, le groupe audiovisuel espagnol a vu sa proposition ne pas être retenue par la Ligue.

L'Allemagne, théâtre d'une guerre ouverte entre DAZN et la Ligue

Pour trouver un pays voisin qui se rapproche le plus de la situation de la France, enjambons le Rhin pour nous rendre en Allemagne. Pas pour le côté financier car la Ligue de football allemande (DFL) a obtenu de ses deux diffuseurs, Sky et DAZN, 1 milliard d'euros par an sur la période 2021-2025, mais plus pour les rebondissements autour des négociations des droits domestiques de la période 2025-2029. Après son appel d'offres lancé en avril, elle a décidé d'accorder son lot B, le plus important puisqu'il contient le multiplex de 15h30, les rencontres du vendredi ainsi que les barrages pour le maintien, à la chaîne Sky, traditionnel diffuseur de ces matches-là. Cette décision a provoqué l'ire de DAZN, qui estimait avoir pourtant fait une offre bien plus importante.

Les dirigeants du football professionnel allemand se sont justifiés en expliquant n'avoir pas reçu les bonnes garanties financières de la part de la plateforme streaming. Ce que dément DAZN, qui a lancé une action en justice. En attendant, les négociations sont gelées, ce qui a provoqué l'inquiétude des clubs allemands. Comme l'a révélé le quotidien Bild début juin, le Bayern Munich a même posé vingt questions par courrier à la DFL, au nom de tous les clubs professionnels allemands, pour exiger plus de transparence et des explications de la part de la Ligue. Pas de quoi, tout de même, faire de la concurrence à notre feuilleton.

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