Posté le 3 septembre
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« On fait une compétition européenne sans avoir les moyens d’un club européen », explique Grégory Lorenzi (Stade Brestois)

Par Thierry Dilasser
Le 03 septembre 2024 à 20h22

Au sortir d’un mercato intense, où les arrivées se seront multipliées dans la dernière ligne droite, Grégory Lorenzi, directeur sportif du Stade Brestois, dresse le bilan.



Un mercato particulier, à plus d’un titre. Le considérez-vous réussi ?
Particulier, déjà, parce qu’on a une compétition supplémentaire à jouer. Il était donc important de pouvoir apporter un certain nombre de joueurs aguerris, pour la Ligue 1 déjà, notre objectif principal, mais aussi pour cette Coupe d’Europe et l’enchaînement de matchs tous les trois jours. C’est aussi pour ça qu’on a pris plus de joueurs d’expérience. Je trouve qu’on s’est assez bien étoffés, qu’on s’est équilibrés, même si on a toujours l’envie de vouloir mieux faire. Maintenant, comme pour chaque mercato, ce sont les résultats qui parleront.

Quelles sont les principales difficultés auxquelles vous avez été confronté ?
Déjà, il fallait respecter à l’enveloppe qui nous a été allouée. Après, il faut comprendre que beaucoup de joueurs nous ont répondu que c’était sympa d’avoir pensé à eux, que notre discours et notre projet étaient top. Mais que Brest, notre stade, notre ville… C’est notre réalité. Moi, ça ne me choque pas, ça fait des années que je suis confronté à ça. Ça fait partie de notre histoire. On ne se plaint pas, on est préparé à ça.

Le cas de Satriano ne résume-t-il pas à lui seul le manque d’attractivité du Stade Brestois ?
Ce n’est pas méchant ce que je vais dire, mais parfois les gens rêvent. Je n’en veux pas du tout à Satriano. Il faut simplement comprendre qu’on ne fait pas venir un joueur en claquant des doigts ni parce qu’on joue la Ligue des champions. Satriano, on a fait une proposition qu’on n’avait encore jamais faite, avec des conditions salariales très élevées. On a fait les efforts mais ça n’a pas suffi. Après, le joueur fait ce qu’il veut et estimé que la proposition de Lens était meilleure, même sans Ligue des champions. Tu es obligé d’accepter la concurrence, les envies de chacun. Chaque année, il faut convaincre, être patient, donner des arguments, et sans tout maîtriser.

Avez-vous un autre exemple ?
Il y en a beaucoup. Mais je peux vous parler de ce joueur de la Roma, un garçon qui a fait 30 matchs avec Mourinho (Edoardo Bove, finalement parti à la Fiorentina). Jusqu’au dernier jour, 18 h, on a fait des visios, présenté des vidéos de la ville, répondu à ses questions. Et c’est là où on voit qu’on part de loin. Pourtant, on aurait aimé avoir ce joueur, d’un très beau calibre… Et encore, là, on a été écouté parce qu’on fait la Ligue des champions. Sinon, les joueurs, même pas ils ne répondent…

Vous n’en avez pas moins atteint votre objectif, avec 26 joueurs sous contrat et en ayant recruté aux postes ciblés. Et ce, malgré un contexte compliqué…
Il faut parler de ce contexte ! Et rappeler qu’aujourd’hui, le modèle économique du foot est en train de changer avec la crise de droits télé. Certains clubs de notre catégorie - comme Montpellier, Reims, Auxerre, Le Havre - n’ont pris aucun joueur ou que des joueurs libres. Nous, on a la chance d’avoir la Ligue des Champions pour investir et nous développer. Mais tout en ayant l’obligation de se projeter sur plusieurs années. C’est pour ça que mon travail est très difficile, parce que d’un côté, il y a une attente et l’obligation de renforcer l’effectif mais, de l’autre, un budget à équilibrer tout en préparant l’avenir, de façon cohérente. Il ne faut pas croire que c’est facile.

Entre la crise des droits télé et la Ligue des champions à préparer, en quoi ce mercato restera comparable à aucun autre ?
Sur les joueurs, tout simplement. Parce qu’aujourd’hui, on a un club qui fait une compétition européenne sans avoir les moyens d’un club européen. À un moment, on a voulu rentrer dans des négociations avec des joueurs qui pouvaient nous apporter du clinquant. Mais on s’est aperçu qu’on partait de trop loin, et on a préféré reculer pour ne pas faire n’importe quoi. Le risque, c’est de céder à la tentation et, derrière, de ne plus avoir que nos yeux pour pleurer si ça ne fonctionne pas parce que financièrement, on se serait mis dedans.

C’est votre 10e année à ce poste. Est-ce le mercato qui vous a le plus usé ?
Chaque année, il est usant. Mais c’est vrai que celui-ci était particulier. Cela reste quand même une belle expérience, et je ne vais pas me plaindre parce qu’on fait une Coupe d’Europe ! Au contraire. C’est quelque chose d’exceptionnel.

Sur les douze recrues de l’été, six ont signé durant les 48 dernières heures du mercato. Comment avez-vous vécu ce laps de temps décisif ?
Rien que le dernier jour, j’ai fait sept mouvements, deux sorties et cinq arrivées. Ça a été très, très mouvementé. Mais ce n’est pas moi qui ai voulu faire les dossiers le 30 août. Je suis le premier à le dire, la longueur du mercato est aberrante. Mais pour faire venir un joueur, il faut que trois parties s’entendent. Doumbia, on le voulait depuis le début. Mais il a fallu attendre le dernier moment pour que tout le monde tombe d’accord. Mama Baldé, pareil. Les discussions avaient débuté depuis longtemps, mais le « ok » est venu le 30, à 18 h. Et on ne l’a enregistré qu’à 22 h 54, quand on avait jusqu’à 22 h 59 pour le faire. Là, on était à la limite… On est finalement partis à 2 h du matin. Fatigués. Vraiment fatigués.

Ne ressentez-vous pas une forme de lassitude à travailler avec si peu de moyens ?
Je connais le contexte dans lequel je suis. Je sais qu’on sera toujours confrontés à ce déficit d’images. Et de moyens. Un club, ça se construit, une image, aussi. Aujourd’hui, ça fait que six ans qu’on est en Ligue 1. On n’est pas un club historique qui pèse, avec les infrastructures qui vont avec. Mais je ne me pose pas trop de questions. Je le sais, c’est comme ça. Et puis, je l’assume. Et tant que j’ai de la motivation, je donnerai toujours le meilleur.

Le mercato du Stade Brestois est-il bouclé ?
Oui et non. J’ai toujours une réflexion, sur un poste, pour apporter une touche supplémentaire, on va dire un poste médian défensif. Donc, pour l’instant, le mercato n’est pas encore fini à 100 % dans mon esprit. C’est une réflexion. Mais je vais rester vague, j’attends de voir un petit peu…

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