Mardi 17 septembre, la Commission européenne a dévoilé une révision de ses recommandations de 2009 contre le tabagisme. Avec un objectif : voir émerger une «génération sans tabac».
La cigarette en terrasse autour d’un verre va-t-elle bientôt faire ses adieux ? Alors que douze millions de Français fumaient chaque jour en 2022 selon Santé publique France, l’État renforce graduellement sa lutte contre le tabagisme. Si la hausse du prix du tabac, et notamment du paquet de cigarettes est le fer de lance de cette politique, d’autres mesures restrictives sont également mises en avant, avec l’approbation, voire l’appui, de Bruxelles. Quitte à susciter l’ire de professionnels, et faire disparaître des pratiques bien ancrées dans l’imaginaire tricolore.
Mardi 17 septembre, la Commission européenne a ainsi dévoilé une révision de ses recommandations de 2009 contre le tabac. Avec un objectif en tête : voir émerger une «“génération sans tabac”, dans laquelle moins de 5% de la population consommerait du tabac d'ici 2040, contre environ 25% aujourd'hui». Dans ce document, l’exécutif européen formule plusieurs conseils aux capitales, et recommande tout particulièrement aux États membres «d'étendre les politiques en faveur d'environnements sans fumée aux principaux espaces extérieurs». En d’autres termes, les capitales devraient limiter l’usage de tabac dans d’autres lieux, en plus de ceux déjà définis jusqu’ici.
Le texte liste ensuite plusieurs types d’espaces concernés, qui vont des «terrains de jeux publics» aux «parcs d’attractions», en passant par les piscines, les zoos, les arrêts de bus, les aéroports, les «espaces extérieurs associés à un lieu de travail», ceux liés aux hôpitaux, aux établissements d’enseignement, aux bâtiments publics, maisons de retraite ou «locaux liés aux soins de santé» en général. De même, la Commission recommande d’agir sur les «espaces extérieurs des restaurants, bars, cafés et des espaces extérieurs d'autres locaux similaires», comme leurs terrasses. «Il existe souvent une exposition très importante à la fumée et aux aérosols secondaires dans les espaces extérieurs et semi-extérieurs», se justifie l’exécutif européen.
Des «recommandations» non contraignantes
Concrètement, ces recommandations ne sont pas, en l’état, contraignantes, comme le rappelle la Commission dans un communiqué. Chaque capitale est libre de lutter comme elle l’entend contre le tabagisme et le tabagisme passif : «Étant donné que la politique de santé relève de la compétence des États membres, ils sont invités à mettre en œuvre ces recommandations au moyen de leurs propres politiques, comme ils l'entendent, c'est-à-dire en tenant compte de leur situation et de leurs besoins nationaux», souligne Bruxelles. Il reviendra donc au gouvernement français de déterminer si la législation en vigueur doit être modifiée, à l’avenir, pour atteindre cet objectif d’une «génération sans tabac». Le cas échéant, la Commission peut aussi aider les gouvernements via un «financement pour aider les États membres à mettre en œuvre les mesures recommandées».
Dans l’Hexagone, la loi interdit déjà de fumer dans de nombreux lieux depuis plus de quinze ans. Sont ainsi concernés les «lieux fermés et couverts accueillant du public ou qui constituent des lieux de travail, dans les établissements de santé, dans l'ensemble des transports en commun, et dans toute l'enceinte (y compris les endroits ouverts telles les cours d'écoles) des écoles, collèges et lycées publics et privés, ainsi que des établissements destinés à l'accueil, à la formation ou à l'hébergement des mineurs». Il est toutefois possible de fumer sur les terrasses des bars et restaurants, si celles-ci sont ouvertes.
Sans surprise, les recommandations de la commission européenne ont été accueillies de différentes manières. Sur X, certains internautes s’en réjouissent, quand d’autres sont plus mitigés. «Je suis non-fumeur et je déteste recevoir de la fumée mais il s'agirait quand même de laisser les gens vivre un minimum non», s’étonne l’un d’eux. «Je suis le premier à aimer fumer en terrasse, mais oui pas filer le cancer à tout le monde c'est bien», affirme un autre. De son côté, la profession s’inquiète des répercussions d’une possible interdiction de la cigarette en terrasse : «Il faut d’abord s’attaquer à la fraude, à la contrebande, s’est ainsi exclamé Franck Delvau, représentant de l’Umih en Île-de-France, sur le plateau de BFMTV. [...] Fermons les tabacs ! Pourquoi on s’attaque aux restaurateurs, aux brasseries», a ajouté le président de l’organisation, mettant en garde contre des «licenciements» si cette piste passait.
De son côté, la Commission assure que les effets d’une limitation du tabac sont limités «sur le secteur de l’hôtellerie et de la restauration». Elle cite ainsi l’exemple de la Hongrie, qui «s’est traduit par une augmentation [...] du flux de clients et des revenus tirés de l’hébergement». De même, «en Irlande, [...] l'incidence économique globale de l'interdiction sur les bars a été négligeable à la suite de sa mise en œuvre». Reste à voir si ces arguments convaincront Paris de suivre ces recommandations.