Posté le 10 février
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Le budget 2025 acte des mesures d'économies sur le crédit d’impôt recherche et le crédit d’impôt innovation. La bataille autour du statut de jeune entreprise innovante continue, mais sa forme actuelle semble menacée, au grand dam des représentants de start-up.

A Bercy, on se satisfait du vote définitif du projet de loi de finances. Mais celui-ci va coûter cher aux start-up.

Pour le monde de l’innovation, la potion du budget 2025, adopté définitivement par le Sénat le 6 février, est amère. Avec 5,3 milliards d’euros de crédits pour 2025, le plan France 2030 contribue à l’effort d’économies à hauteur de 2,5 milliards d’euros. En outre, deux aides à l’innovation sont amputées, le crédit impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation, tandis que la forme actuelle du statut de jeune entreprise innovante (JEI) semble menacée.

«Le message est difficilement compréhensible en plein sommet sur l’IA et au moment où on ne doit pas rendre la France moins attractive», regrette Marianne Tordeux-Bitker, directrice des affaires publiques chez le lobby des start-up France Digitale, auprès de L’Usine Nouvelle. «Dans un contexte économique où tout irait bien, on pourrait dire que ce n’est pas très grave. Mais la fiscalité reste pénalisante, le coût de l’énergie élevé et la compétition internationale s’exacerbe. Ces dispositifs visaient à rendre un peu plus supportable ces contraintes. Là, on nous appuie encore un peu plus la tête sous l’eau», abonde un défenseur des start-up industrielles.

Moins de dépenses éligibles au CIR

Le texte de la loi de finances prévoit une économie d’environ 400 millions sur le CIR, un dispositif qui a aidé les entreprises à hauteur de 7,7 milliards d’euros environ en 2024. Dans le détail, il limite le périmètre des dépenses de recherche éligibles à un crédit d’impôt de 30%, applicable dans la limite de 100 millions d’euros.

Les dépenses concernant les brevets et celles de veille technologique, qui pouvaient être pris en compte jusqu'à 60000 euros par an, disparaissent de la liste des dépenses éligibles. Les dépenses de fonctionnement issues d’opérations de recherche scientifique et technique restent éligibles, mais dans une moindre proportion que par le passé. Même chose celles liées aux jeunes docteurs qui étaient auparavant prises en compte pour le double de leur montant pendant deux ans après un premier recrutement en CDI. Cette disposition disparaît.

Le crédit d'impôt innovation remodelé

«C’est un des pires scénarios que l’on anticipait. On avait imaginé à un moment un arbitrage entre les dépenses de brevets et celles en faveur des jeunes docteurs, mais ces deux types de dépenses ont finalement été retirées», déplore le représentant des start-up industrielles. Ce dernier rappelle que ces entreprises se servent des brevets à la fois pour protéger leur propriété intellectuelle, mais aussi pour les valoriser financièrement, par exemple à travers des licences d’utilisation.

Pour maintenir les autres aides à l’innovation, l’association France Digitale proposait depuis plusieurs mois d’exclure les dépenses de veille technologique de celles éligibles au crédit d’impôt recherche. Mais Marianne Tordeux-Bitker regrette le coup de rabot sur les dépenses liées aux jeunes docteurs. «Il y avait une justification à prendre en compte ces dépenses deux fois pendant deux ans, car dans un premier temps les profils de ce genre font uniquement de la recherche sans rien produire, ce qui représente un coût énorme pour l’entreprise», estime-t-elle.

Autre mesure définitivement entérinée : le remodelage du crédit d’impôt innovation, qui reste toutefois maintenu alors que ce dispositif devait initialement s’éteindre au 31 décembre 2024. La version définitive du budget fait passer la réduction d’impôt sur les sociétés réservée aux PME pour des dépenses liées à la conception de prototypes de 30 à 20%. Ces dépenses pourront être prises en compte depuis le 1er janvier 2025. L’effort d’économie s’élève à environ 100 millions d’euros. Le texte étend en outre la durée de ce dispositif, moins stratégiques pour les start-up industrielles, à 2027.

Le sort du CIR n'est pas encore scellé

Selon Bercy, l’économie réalisée sur le CIR en particulier «permet de financer le maintien du dispositif JEI» débattu dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025, alors que le gouvernement Barnier envisageait de le réduire drastiquement. Grâce au statut de JEI, les start-up de moins de huit ans avec des dépenses intensives en R&D bénéficient d’une exonération de cotisations sociales patronales sur les rémunérations versées à leurs salariés actifs dans l’innovation.

La deuxième partie du PLFSS, qui a fait l’objet d’un 49-3 mercredi 5 février, reprend sur ce point le texte adopté par le Sénat fin janvier. Celui-ci préserve bien le dispositif tout en faisant passer de 15 à 20% la part des dépenses de recherche dans les charges nécessaires pour accéder au statut. Une économie de 50 millions d’euros est recherchée. Pour les start-up industrielles, c’est globalement un moindre mal par rapport au texte discuté fin 2024 qui vidait largement le statut de JEI de sa substance. Leur niveau de dépenses en R&D dépasse fréquemment ce seuil, contrairement à d’autres start-up. «C’est toujours mieux que rien, mais des entreprises industrielles en phase de pré-commercialisation qui embauchent plutôt des commerciaux, des spécialistes du marketing et des juristes pourraient quand même être pénalisées», prévient Marianne Tordeux-Bitker. Pour les start-up qui ne seront plus éligibles au JEI, le coût du travail des salariés concernés va augmenter. Dans une période où les levées de fonds sont difficiles, le risque est de provoquer un arrêt des recrutements et même des licenciements dans les start-up en manque de cash.

Les représentants de start-up espèrent un aménagement de dernière minute «Le feuilleton n’est pas terminé. Le texte doit encore passer au Sénat, puis en commission mixte paritaire vers la mi-février», souligne Marianne Tordeux-Bitker. L'espoir est ténu d'avoir une addition moins salée.

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