Le cerveau humain n’est pas fait pour durer dans le temps, et si on l’y contraint par quelque force occulte, il tolère mal cette entorse faite aux lois de la nature. Au début, c’est la mémoire à court terme qui est touchée, un objet qu’on ne se rappelle plus avoir déplacé, une conversation qu’on doute avoir mené. Ensuite, la notion d’espace. Lorsque ce sont des lieux fréquemment fréquentés, on pense juste s’être déplacé en étant pris dans ses pensées, mais lorsque cela arrive dans un lieu inconnu, on se sent comme une souris au milieu d’un labyrinthe. L’étape suivante, c’est la notion du temps. Des heures entières qui disparaissent d’une journée, ou encore l’incapacité de poser une date sur un événement. Le plus terrible, c’est quand la mémoire à long terme est touchée, car ce sont les souvenirs qui en pâtissent. Oublier où on a vécu, effacer un sourire familier, ne plus avoir conscience qu’un proche est décédé… Nos souvenirs ne sont-ils pas la base de nos émotions ? J’ai l’impression qu’il ne me reste que cela, un torrent de réactions émotionnelles qu’il m’est impossible de relier à des souvenirs.
Comment peut-on prendre des décisions dans de telles conditions ?
La seule option reste de s’appuyer sur une personne de confiance, qui reconstituera l’ordre logique des récits, n’omettra aucun détail et qui, par dessus tout, n’essayera pas d’en tirer avantage.